Les Frac
sont riches
de trésors
d'une grande
valeur et d'une
incroyable
diversité qui
justifient le
déplacement
de certaines
d'entre-elles
au-delà
des océans
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Pour fêter leur vingtième année d'existance, les Frac, organisent un évènement artistique à l'échelle nationale. Les 22 Frac, qui réunissent un fond de 15000 oeuvres réalisées par 3000 artistes, se décentralisent pour marquer le coup. Ont été choisies un millier d'oeuvres qui seront exposées, de juin à octobre 2003, dans 14 lieux eux-mêmes répartis dans quatres villes stratégiques : Avignon et Arles pour leurs festivals d'été qui devraient attirer la foule, Nantes et Strasbourg qui sont des centres artistiques et culturels particulièrement dynamiques en France. Le but de cette initiative, outre d'en faire la plus importante manifestation d'art contemporain jamais réalisée en France, est de montrer à un public le plus large possible, la richesse des "trésors » des Fonds régionaux d'art contemporain.
La ville de Strasbourg est heureuse et fière d'accueillir l'un des volets de cette exposition et met à disposition cinq lieux non pas des moins importants : le Palais du Rhin, la Chaufferie, le CEAAC, la Villa Greiner, et le Musée d'Art moderne et contemporain ; et organise, en sus, un Itinéraire Bis à travers l'Alsace.
Parler de tous les artistes, exposés dans la capitale alsacienne, serait sans doute très ambitieux. Nous verrons, donc, dans son ensemble l'ampleur de la manifestation en alsace.
Absalon
Le vernissage s'est consitué en un parcours inaugural des cinq lieux strasbourgeois qui à été pour le moins animé ! Étaient présents pour l'occasion Madame le Maire de Strasbourg, Fabienne Keller, le Président du Frac, Robert Grossman et le Ministre de la culture, Jean-Jacques Aillagon, Jean-Luc Bredel, Adrien Zeller (les intermittents du spectacle ont profité de la présence de tous des officiels pour manifester un certain mécontentement durant toute la matinée d'inauguration).
Le départ, de ce petit parcours, s'est fait dans la salle de bal du Palais du Rhin. Le bâtiment est l'ancien palais construit par l'architecte Hermann Eggert pour l'empereur Guillaume Ier à la fin du 19ème siècle. L'exposition proposée débat sur la relation des arts plastiques à l'achitecture. Une vingtaine d'oeuvres ont été choisies pour le constat qu'elles font de cette relation de l'art à la ville et de l'illusion qu'elles peuvent donner du "rêve d'un autre monde". On peut découvrir des travaux de Jean-Marc Bustamante, Dan Graham, Robin Collyer, Dennis Oppenheim, Boltansky, entre autres.
La Villa Greiner (qui date de 1884, sur les plans de S. Revel) a réouvert ses portes pour l'occasion. Avant d'être appelée à devenir le Centre de l'illustration de Tomi Ungerer, la Villa renferme dans son antre une exposition intitulée "Du côté de chez soi". On retiendra parmi les artistes qui sont réprésentés ici, Christophe Vigouroux dont les petites aquarelles abordent avec humour des thèmes de la vie quotidienne. Des photographies de Pierrick Sorin, des peintures de Roman Opalka, un album-collection d'Anette Messager, Jean Le-Gac, Sophie Calle, Bartolomeo, Ben et même un tout petit portrait d'Andy Warhol sont visibles à la Villa.
Jean-Marc Bustamante
Si en pénétrant dans l'espace un quatuor de femmes nous accueille, la mise en marche d'une alarme stridente nous expulse précipitamment et nous dirige aussitôt vers un ancien local de chaufferie des bains municipaux désormais transformé en lieu d'exposition attenant à l'école des Arts Décoratifs.
La Chaufferie a été réservée à une installation d'Absalon : Disposition, 1990. Le petit espace est envahi par un rassemblement de modules blancs aux formes géométriques, qui sont, en fait, la métamorphose de pièces détachées d'une mobylette. Entre architecture et sculpture minimaliste, Absalon mène le spectateur à la méditation et la réflexion.
Le CEAAC : centre européen d'actions artistiques contemporaines. Dans un bâtiment "Art nouveau" construit en 1902, discrètement revu par Eric Gautier en 1994, on découvre des oeuvres traitant du paysage. Observation de la nature, intervention, déplacement ou simplement constat, depuis les années 60 les artistes ne s'attardent plus dans leurs ateliers mais envisagent le rapport à la nature en face. Sont représentés : Peter Hutchinson, Hans Haake, Nils Udo, David Smithson, Guiseppe Penone, Elina Brotherus, Adams…
Et pour finir ce tour d'horizon, certes succinct, le musée d'Art moderne et contemporain, encore un lieu phare de la vie culturelle de Strasbourg, fait un tour d'horizon du cinéma dans les arts plastiques (l'architecte Adrien Fainsibler a vu son projet inauguré en 1998). En effet, le septième art s'est beaucoup imposé depuis les années 70 et il est devenu un terrain d'expérimentation privilégié de bon nombre d'artistes. On peut trouver au fil de cette exposition des travaux récents de Pierre Huygues, Cindy Sherman, Dan Graham, Gonzalez-Forester, Jean Le-Gac, Sam Samore, Raymond Petitbon, ...
Gonzalez-Forester
Le parcours alsacien ne s'arrête pas à la découverte de ces quelques espaces strasbourgeois, il s'étend à travers toute la région. Un itinéraire allant d'Andlau au CRAC d'Altkirch a été mis en place pour voir d'autres oeuvres d'artistes contemporains.
Les Icônes/monochromes de Léa Lublin côtoient les retables du 17ème siècle en l'église Saint-André d'Andlau. A Epfig "Les deux papillons" de Bertrand Gadenne se fondent dans l'architecture de la chapelle Sainte-Marguerite. Robert Goddard, "manipule du rêve pour en faire de la réalité", dans la chapelle Saint-Sébastien de Dambach-la-ville. Puis les lieux réservés à l'art, le Frac à Sélestat bien sur mais aussi le musée du textile à Hussern-Wesserling, les espaces Lézard et d'art contemporain André Malraux de Colmar, le Musée des Beaux-Arts de Muhouse, en tout, douze endroits participent aux "Trésors publics" de juin à décembre.
Ce périple, nous met le doigt sur les grandes préoccupations et interrogations des artistes de ce siècle. L'art actuel interroge le paysage, questionne ou investit l'architecture, utilise le cinéma et révèle l'intimité d'une vie quotidienne souvent tabou. La création contemporaine est la preuve d'une réinvention de la pensée, d'un déplacement du faire, d'expérimentations nouvelles, d'une hantise de l'oubli et de la mutation de notre société.
Les Frac sont riches de trésors d'une grande valeur et d'une incroyable diversité, qui justifie le déplacement de certaines d'entre elles au-delà des océans. Du Japon au Chili, d'Hawaï en Autriche, ou du Pérou aux Etats-Unis, les oeuvres acquises par les fonds régionaux sont très demandées. L'abondance et la valeur de ces trésors méritent et justifient bien une telle aventure, et pourrait peut-être devenir le prétexte d'un petit tour de France des Frac pendant ces longs mois d'été!
Sophie Ka, Strasbourg, Juillet 2003
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