Dix ans après les élections démocratiques scellant la fin du régime d'Apartheid, douze artistes sud-africains exposent au Palais des Beaux Arts de Charleroi en Belgique. Jane Alexander, William Kentridge et Willie Bester : les grandes figures de la résistance s'illustrent aux côtés des représentants d'une jeune génération d'atistes née avec les premiers évènements de Soweto. Vidéo peinture, installations et photographies renvoient les inquiétudes et les doutes d'une société déchirée, pétrie par la violence où le lien social est aujourd'hui à réinventer. Arrêt sur image.

Violence
Juste après le 11 septembre 2001, Willie Bester, né en 1956, assemble à partir des matériaux de récupération dont il est friand, "Dogs of war", un chien menaçant, portant une mitraillette greffée sur le dos. "Le chien est le miroir de l'homme. On ne conquiert pas la paix par la guerre" commente l'artiste dont la pièce fait écho à ces chiens dressés pour tuer les gens de couleurs du temps de l'Apartheid.

Exorcisme
Conviant bourreaux et victimes à témoigner, la commission Vérité et Réconciliation révélait au grand jour les pires exactions commises du temps de l'Apartheid. En proposant un long panoramique des abords de la ferme de Vlakplaas, lieu clandestin d'assassinat et de torture, Jo Ratcliffe, née en 1961, révèle, à travers ce paysage banal et vaguement inquiétant, l'impossibilité à figurer à l'horreur.

Clive van den Berg, "Drawing from sketch book",
2001, crayon et encre

Purification
Convoquant les éléments (herbes, terre, feu eau, graines, bois et racines), Sandile Zulu, né en 1960, propose dans ces peintures de feu et installations de plantes aux propriétés curatives une métaphore d'une possible transformation en profondeur du monde.

Résonance
Lit de bois flanqués de rangées d'ampoule, Clive Van den Berg, né en 1956, s'exprime sur la terrible question du Sida qui touche aujourd'hui 30% de la population en Afrique du Sud. La façon scandaleuse, criminelle qu'a eue le gouvernement de nier le problème, révèle à ses yeux une attitude plus générale où "à force de célébrer la libération nous ne réfléchissons pas aux enjeux".

Véronique Bouruet-Aubertot
Paris, avril 2004