Sans heurts et sans sursauts, mais fruit d'un effort surhumain, il est sorti de terre en un clin d'oeil. Passerelle entre le monde des industries et celui des arts, ce navire amiral est arrivé à bon port. Campé contre la façade de la Bibliothèque François Mitterrand, la lumière le traverse pourtant comme autant de promesses pour les curieux que nous sommes. Marin Karmitz et sa nouvelle Cité de l'Image vont-ils nous étonner.

Pour une fois multiplexe brille par le vide. Nul ne s'entasse misérablement. Tout est dans l'air que l'on respire et cette hauteur magistrale qui nous entoure. Mais l'étonnement vient surtout de l'idée simple mais efficace de jeter un pont entre les galeries d'art contemporain du quartier (rue Louise Weiss, rue du Chevaleret et rue Emile Durkheim) et ce temple du cinéma. Plus que la rencontre d'image, il s'agit ici aussi d'un engagement formel important, la défense de l'art contemporain, l'engagement d'une entreprise : MK2.

Donner ainsi l'opportunité à plus d'une douzaine d'artistes d'exposer leurs oeuvres est avant tout le reflet de l'engagement d'un homme pour qui l'entreprise est un art et vice-versa. Sans attendre que l'environnement législatif y soit propice l'homme se laisse donc envahir. Dedans comme dehors, le lieu recèle d'oeuvres : de l'installation l'Arrangement (le Mépris) d'Ange Leccia au canapé-voiture Bonnie & Clyde du designer Jerzy Seymour, en passant, en vitrine extérieure, à la vue de tous, par UltraLab et leur métaphore de la décharge de données informatique que l'on peut retrouver sur www.gomipark.com, toutes sélectionnées par la commissaire d'exposition Caroline Bourgeois.

Affaire à suivre donc, les passerelles avec l'art contemporain devant se renouveler tous les trois mois… Car rappelons que seul le temps permet de constater le véritable engagement d'un entreprise envers l'art, et de faire "fi" à toute accusation de détournement à des fins de communication.

Alors l'art contemporain au service du cinéma ou le cinéma au service de l'art contemporain ?

Philippe Agéa
Paris, février 2003