La Fondation Beyeler de Riehen (Bâle) poursuit la présentation des grandes figures de l'art du 20e siècle.
En contre point des artistes actuels qui se veulent toujours plus impliqués dans le monde et ses problèmes… |
Henri Matisse, nu bleu I, 1952
Peu d'artistes ont traversé la 1ère moitié du 20e siècle qui a connu tant de bouleversements, de polémiques, de conflits, tant de concepts contradictoires, porté aux nues et aussi parfois critiqué tant d'artistes, en gardant une stricte ligne directrice de création.
Henri Matisse est l'un d'eux. Il est alors devenu une sorte de repère, une référence, une norme indispensable pour tous les amateurs d'art, un peu comme le fut Léonard de Vinci en son temps. Car cet artiste que ni son origine provinciale ou sa famille modeste ne prédestinaient à tant de gloire, a su rester serein, distant, presque sourd aux péripéties ou drames qui l'entouraient. Lancé dans une épopée picturale personnelle, il ne laisse rien transpirer des événements dont il est le témoin. De la guerre de 1914-1918, il ne montre rien. Pas un mot ni une allusion non plus de celle qui, 20 ans plus tard, transformera à jamais la société occidentale et qui pourtant l'obligea à quitter Paris en laissant ses œuvres en dépôt dans les coffres de la Banque de France. Henri Matisse, la table noire, 1919
Non, ce qui intéresse Henri Matisse et le captive au sens propre du terme, c'est la peinture, la magie des formes et des couleurs. Il est à la recherche des fondements qui permettent de quitter le formalisme classique pour créer des sensations nouvelles, réjouir le spectateur, créer une euphorie à la limite de l'érotisme. Les sujets choisis dans cette recherche ne sont naturellement pas pris au hasard. Au début, après une courte aventure dans le fauvisme, il creuse son propre sillon et choisit d'utiliser les modèles féminins de son entourage, un grand nombre de nus, pour prendre en charge son ambition.
Mais alors que sa technique se précise, à partir des années 20, il "habille" subrepticement ses modèles pour en faire d'abord des "odalisques" et se contente ensuite de plus en plus de natures mortes, de représentations florales ou de scènes domestiques banales. Sa peinture s'épure, devient de plus en plus dépouillée, symbolique même dans les collages de papiers colorés qui apparaissent vers 1947-1950 alors que l'arthrose le frappe et ne lui permet plus de manier le pinceau avec autant de dextérité. Mais toujours la couleur et l'espace. Henri Matisse, poissons rouges et sculpture, 1912
En contrepoint des artistes actuels qui se veulent toujours plus impliqués dans le monde et ses problèmes existentiels, l'exposition de la fondation Beyeler, grâce à un parfait ordonnancement chronologique, montre qu'un artiste aussi passionné qu'Henri Matisse, peut arriver à s'isoler des drames qui l'entourent pour exprimer avec toujours plus de force et de raffinement, mais aussi d'économie, l'émotion qui envahit l'âme, dans sa profondeur. Un grand art.
Henri Matisse, fleurs et céramique, 1913
Henri Matisse
Henri Matisse, la musique, 1939
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Fondation Beyeler, Baselstrasse 101, CH-4125 Riehen/Bâle, tél. : +41 61 645 97 00, www.beyeler.com
ouvert tous les jours de 10.00 à 18.00h, du 19 mars au 9 juillet 2006.
Catalogue publié par Hatje Cantz en allemand et en français, articles de Philippe Büttner, Isabelle Monod-Fontaine, Ulf Küster,
200 pages avec 135 illustrations, prix : 49 Frs
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