La Centrale électrique accueille dans ses murs une importante exposition représentative de la jeune création contemporaine française. L'occasion rêvée de juger sur pièce la vivacité de la scène artistique hexagonale. Dix-neuf artistes, toutes générations confondues, ont donc fait le voyage, pour nous convaincre de leur pertinence.
Y aurait-il une qualité propre à la scène artistique française ? Sans doute pas… |
Martin Le Chevallier, "Le papillon", 2005, vidéo intéractive, dvd,
courtesy Galerie Maisonneuve, Paris
La jeune création contemporaine française avait déjà fait parler d'elle, puisqu'on avait pu voir un bon panorama de cette dernière, au printemps 2006 au Palais de Tokyo (Notre Histoire). La Force de l'Art, autre exposition phare parisienne, était portée aussi par ses nouvelles pousses Made in France.
Il semble donc que ce soit la nouvelle mission de l'Afaa (l'Association française d'Action artistique) rebaptisée CulturesFrance et à l'initiative du ministre français de la Culture d'avoir choisi de mettre l'accent sur la promotion de l'art contemporain français, aussi bien sur son territoire, qu'à l'étranger. Des créateurs, pour certains connus internationalement, qui participent plus largement d'une politique de globalisation du marché de l'art.
Nonobstant les intentions économiques sous-jacentes, y aurait-il une qualité propre à la scène artistique française ? Sans doute pas, en revanche il y a fort à parier que l'on retrouve chez ces artistes des interrogations et des thématiques caractéristiques de la création mondiale actuelle.
Corinne Marchetti, dessin préparatoire, 2006, Installation de broderie,
courtesy Galerie Laurent Godin, Paris
Ce qui retient alors c'est l'ouverture de pistes de réflexion sur la modernité par certains d'entre eux, à l'instar d'un Martin Chevalier qui a sans aucun doute porté la vidéo dans une nouvelle direction avec un travail centré sur l'interactivité. Pistes et thématiques rapprochent également des plasticiens entre eux. Des familles se dessinent qui établissent par exemple des passerelles entre les interrogations sur la vie religieuse de Clarisse Hahn, avec son documentaire Protestant, et Valérie Mréjen qui avec Milk témoigne sur un ton aussi comique que cruel, du retour à la vie séculière de jeunes gens issus de la communauté juive orthodoxe. Bruno Serralongue, resté quant à lui fidèle à l'image fixe, photographie en journaliste reporter d'image, la vérité sociologique et politique de groupes sociaux déterminés : ouvriers chinois sur leur lieu de travail ou manifestants "sans papiers". A la différence de Mréjen et Hahn qui filment des individualités aux prises avec une communauté dont il faut se défaire ou au contraire auquel il importe de se plier, Serralongue s'intéresse au devenir du sujet collectif selon une subtile théorie des ensembles.
Corinne Marchetti, "Marie Margot", 2002, sculpture,
courtesy Galerie Laurent Godin, Paris
Ces plasticiens travaillent donc plutôt à documenter le réel qu'à le détourner, à tout le moins dont le sampling n'est pas le mode opératoire. Bruno Peinado qui récupère les gimmicks de la société de consommation pour en faire des symboles grotesques — on pense à son Bibendum Michelin africain — a une autre approche, et c'est au côté de Virginie Barré qu'il pourrait voisiner. Si cette dernière fait rire volontiers avec un obèse super-héros nourri aux hamburgers (Fat Batman) pour nombre de ses installations, elle suit une direction nettement plus mortifère où percent le meurtre et la folie au cœur même d'une imagerie pop et sucrée.
Corinne Marchetti sa cadette reprend à son compte ce goût pour la caricature et fraye avec l'esthétique kitsch voire populaire, ses Marie Margot, ados prépubères aux sourires en coin ne dupent personne. Et puis, il y a les artistes inscrit dans une logique plus cinématographique tel Laurent Grasso, dont le Paracinéma installe l'image à l'extérieur de son cadre grâce au son et aux dispositifs scéniques des écrans. Au final, cette exposition oblige le visiteur à l'attention la plus juste afin de ne pas manquer une pièce de ce vaste puzzle qui dessine la cartographie d'une création, si elle n'est en devenir, du moins qui appelle commentaires et appréciations. D'abord pour y déceler les apports, et ensuite les possibles redites.
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New Horizons, du 23 mars 2007 au 6 mai 2007, La Centrale électrique, Place Sainte Catherine, 44, 1000 Bruxelles
New Horizons, du 1 mai 2007 au 23 septembre 2007, Marco, Museo de Arte Contemporaneo, Principe 54, 36202 Vigo
Cette exposition a aussi été présentée au Crac Alsace 3 décembre 2006 au 11 février 2007
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