Le domaine de Kerguéhennec : un laboratoire de l'art contemporain, exporevue, magazine, art vivant et actualité
Le domaine de Kerguéhennec : un laboratoire de l'art contemporain



Décor


naturel







Mise


en scène







Décloisonner







Biennale


de Venise





Rencontres







Laboratoire







Mettre en


réseau







Effervescence

Le Domaine de Kerguéhennec n'est pas un lieu ordinaire, mais un centre d'art contemporain complexe, un laboratoire sur un site patrimonial, au cœur de la Bretagne sud, un centre qu'on identifie souvent à son ancien directeur, Denys Zacharopoulos. C'est aussi le premier parc de sculptures contemporaines en France.

Le Domaine propriété du Conseil Général du Morbihan, se trouve à 25 km de Vannes, direction Pontivy. Il faut vouloir y aller, le mériter aussi, mais arrivé, on respire, on est au bout du monde, dans un vivier de la création contemporaine, voire expérimentale, où collection permanente, expositions, manifestations pluridisciplinaires, résidences d'artistes, formation et éditions, sont au programme.

A la découverte du Domaine

Ne pas oublier avant tout que ce n'est pas un espace muséal !
On entre dans un vaste parc boisé (plus de 170 hectares), le long d'une allée bordée d'une étendue d'eau. Il n'y a aucun parcours fléché, le visiteur découvre par lui-même son environnemment. C'est une sorte d'aventure, de prise de contact directe avec l'art. Le service des visites guidées est quand même à sa disposition. Il n'a qu'à se laisser aller à une promenade dans le parc, créé à l'initiative du Fonds Régional d'Art Contemporain de Bretagne, qui renferme quelques quarante-six sculptures : celle de Jean-Pierre Raynaud et ses 1000 pots bétonnés peints pour une serre ancienne ou de Giuseppe Penone et son sentier de charme.
Au milieu des arbres plusieurs fois centenaires, des rhododendrons en fleurs, des sentiers perdus, enfouis sous la végétation luxuriante, on croise, sans autre cérémonie, ni présentation, des œuvres qui font partie intégrante du décor naturel : Les structures flottantes sur l'étendue d'eau de Marta Pan, Les sept colonnes d'Etienne Hadju, Les cubes de Dan Graham, L'Oiseau Phénix de Carel Visser.... Mais elles ne sont pas toujours visibles au premier coup d'œil, il faut errer, s'enfoncer dans les sous-bois : on longe La ligne en Bretagne de Richard Long, fait de branchages. Plus loin, on tourne autour de son Cercle de pierres.
D'autres sont sonores comme l'installation de Max Neuman sur les deux rives du plan d'eau. A quelques mètres de là, près du Moulin du Roc, un carré blanc de François Morellet fait naufrage, léché par le va-et-vient de l'eau. Le visiteur flâne entre ces différentes installations, s'étonne, regarde ou passe son chemin, indifférent. Il fait ce que bon lui semble.
Le château et ses dépendances dont les bâtiments, pour l'essentiel du XVIIIe siècle, abritent depuis 1986, des expositons temporaires, se trouvent au centre du domaine. Etienne Mériaux (né en 1960), artiste maudit, a investi le château. Il cultive le sombre côté de l'artiste, à la Antonin Artaud (mais il en est bien loin !), et dispose déchets, fragments, peinture, écritures dans une mise en scène d'invitation au voyage, au tréfonds de ses préoccupations artistiques.
Un peu plus loin, dans la bergerie et les écuries, les sculptures de Didier Marcel, né en 1961, dialoguent singulièrement sur la mise en espace de meules de foin dans des cylindres en plexiglas, de supports-tomates : tiges de 80 cm de long, plantées dans les murs et d'ensembles de vitrines en plexiglas avec des petites sculptures en plâtre (construction aux trois peupliers ou aux trois figures).

A Kerguéhennec, il existe une vie après Zacharapoulos

On associe en effet le Domaine de Kerguéhennec à Denys Zacharopoulos, son directeur depuis 1992, certains même lui donnent le surnom affectif de papa Kerguéhennec.
Il a mené une politique d'expositions, de cohérence des collections permanentes, des infrastructures. Il a intégré le bâtiment et le parc dans un programme d'activités très chargé : expositions d'art plastique, théâtre, concerts, cirque... Il voulait décloisonner les différentes pratiques artistiques. C'est chose faite.
Il est depuis peu à la DAP, (Délégation des Arts Plastiques) comme inspecteur général à la création artistique, où, dit-on, il est encore plus actif. Ces derniers temps, il court de Venise à Kerguéhennec en passant par Paris dans le cadre de la Biennale de Venise (1er juin - 7 novembre) étant un des commissaires de l'événement.
Le Domaine a coordonné pour une part importante la réalisation du Pavillon français. Il a reçu en résidence pendant trois mois l'artiste Huang Yong Ping et associé à cette entreprise de nombreux partenaires de la région Bretagne. Un ensemble d'étudiants des écoles d'art de Lorient, Quimper et Brest ont participé aux côtés de l'artiste à la réalisation de ses sculptures présentées à la Biennale. C'est aussi cela, Kerguéhennec.

Pour le moment, c'est Jérôme Poggi qui en assure la direction par intérim. Une procédure de recrutement est lancée : qui va pouvoir remplacer le maître de céans ? Un nouveau président a déjà été nommé en la personne de Madame Guillou-Moinard, adjointe au maire à la Culture de Vannes.
Ca bouge, les neufs salariés attendent, le statut du Domaine va-t-il changé ?
C'est en effet une énorme machine. Son budget, 3,5 millions de francs, réparti entre le Conseil général du Morbihan, le Conseil régional de Bretagne, la DRAC Bretagne et la DAP et pour 25%, des ressources propres du centre.
Ses détracteurs lui reprochent de ne pas faire assez d'expositions temporaires, de se noyer dans un trop plein d'activités et finalement, de n'être pas assez à l'écoute du public. C'est oublié l'estampille du domaine, labelisé centre culturel de rencontres, sorte de vaste laboratoire de la création contemporaine. Il essaye et c'est aussi son rôle, de mettre en réseau les institutions et écoles de la région. 30.000 visiteurs (ils étaient 3.000 en 1986) ont franchi le portail d'entrée cette année. Parmi eux, on dénombre un tiers de professionnels, un tiers de grand public et un tiers de spécialistes.
C'est que le lieu est attractif. Il l'est également pour les artistes qui aiment cet endroit. Ils se retrouvent sur un site patrimonial, en plein air : c'est un bel outil de travail, affirme John Millei, peintre de Los Angeles, en résidence à Kerguéhennec et qui exposera son travail produit sur place, en septembre prochain.
En août, le centre accueillera également douze artistes européens venant d'Allemagne, Espagne, Danemark... dans le cadre de la onzième édition de Germinations (manifestation artistique créée en 1981 et organisée par un réseau d'écoles d'art franco-allemandes s'inscrivant dans une politique d'échanges culturels). Il y a toujours de l'effervescence.

Denys Zacharopoulos a fait énormément pour Kerguéhennec, son départ va engendrer certainement quelques changements. Les choses évoluent ; car si c'est un lieu reconnu par le milieu de l'art, artistes et professionnels, on le voudrait un tantinet plus chaleureux. Reste le Parc et ses sculptures qui valent bien de se perdre dans les petites routes qui y mènent.

Muriel Carbonnet

Domaine de Kerguéhennec, 56500 Bigan, France.
Etienne Mériaux, du 22 mai au 25 juillet 1999.
Didier Marcel, du 12 juin au 12 septembre 1999.
Germinations XI, du 1er au 31 août 1999.

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