Comme le critique, le galeriste aime tellement l'art qu'il a parfois été artiste avant d'embrasser sa carrière. Plus extraordinaire est le cas de Jacques Barbier, qui a fermé sa galerie pour se consacrer au collage et au clonage.
recycler les scories du monde |
"J'ai exposé les artistes que j'aurais voulu être. Chacun d'eux exprimait une part de ce que je suis. Tous m'ont appris quelque chose sur moi-même… Et puis un accrochage est un collage, un programme d'expositions est un grand collage, et l'équipe des artistes est un très grand collage"… Drôle d'artiste que cet ancien galeriste, qui à soixante ans, en 1997, a fermé son lieu parisien pour s'installer en pleine campagne, et se consacrer exclusivement à sa propre œuvre, mise en chantier une vingtaine d'années auparavant ! Une jeune femme l'a suivi, délaissant la psychanalyse pour l'écriture, et deux enfants ont grandi, dans une maison imaginée par Barbier au beau milieu de la forêt. "Résurgence tardive de mon besoin de créer, longtemps étouffé par mon activité de marchand. M'intéresser à mon travail après m'être intéressé à celui des autres"… Exit donc celui qui avait réveillé l'intérêt autour de créateurs passionnants tels que Martin Barré, Pincemin, Boileau ou Macréau, et décelé le talent certain d'inconnus d'alors, tels qu'Ogorzelec, Como ou… Guy Resse, autre étrange personnage, marchand d'art (Galerie La Roue) et, lui aussi, artiste colleur !
"Devant l'envahissement par les prospectus d'hypermarchés et de traiteurs au moment des fêtes de fin d'année", déclic, en décembre 2000 : les photographies reproduites dans les documents publicitaires constituent les nouveaux outils. "La récolte est facile, gratuite, abondante, jouissive. J'utilise les pubs au fur et à mesure de leur parution, en rapport avec la bouffe et les loisirs. Je ne stocke pas, l'actualité renouvelle… Ensuite, l'analogie entre la viande et la chair a introduit naturellement le matériel porno". À présent Barbier compose des pages imbriquant fragments d'images et motifs typographiques, à partir de découpages de reproductions aux tons dominants de rouge et de rose. Cuisses de femmes, pièces de bœuf, tarifs, slogans… Il est ici question de coup de cœur et d'écœurement, d'attirance et de rance, de solitude au cœur de l'abondance, de notre façon d'être au monde maintenant.
|
Jacques Barbier, "3 pour 2", collages & clonages,
Galerie Véronique Smagghe, 127 rue Vieille du Temple, 75003 Paris
du jeudi 13 janvier au vendredi 18 février 2005. www.nouveauxrealistes.com
accueil Art Vivant édito Ecrits Questions 2003 2002 2001 2000 1999 GuideAgenda Imprimer haut de page