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Moi ! Autoportraits du 20ème siècle
 
 
Palais du
Luxembourg
Florence
Medicis
Autoportraits
Contemporéanité
Mondrian
Fromanger

Catalogue publié à l'occasion de l'exposition présentée par le Sénat au palais du Luxembourg à Paris, de mars à juillet 2004, exposition qui se poursuit au palazzo Stozzi à Florence jusqu'au 9 janvier 2005. Le choix de Florence prolonge le double hommage rendu aux Medicis à Paris; à Marie de Medicis, première occupante du palais du Luxembourg construit pour elle entre 1612 et 1620 quand elle devint reine de France par son mariage avec Henri IV, et à Leopold de Medicis (1617-1675), qui dans la lignée de Laurent le Magnifique, protecteur des arts et des lettres, fut un collectionneur opiniâtre d'autoportraits d'artistes essentiellement toscans (il acheta néanmoins un Nanteuil). De même que Marie de Medicis fit appel à Rubens pour décorer son palais, Leopoldo n'acquit que des autoportraits d'artistes vivants.

A sa création en 1750, le musée du Luxembourg a perpétué ce souci de contemporéanité en n'exposant que des œuvres d'artistes de l'époque : ainsi de David et de Delacroix, de Gros et d'Ingres, de Vernet, etc…

A cette époque et jusqu'au milieu du 20ème siècle, l'exigence de ce critère d'engagement pour le présent de la création est unique dans le panorama des musées français et rarement pratiqué en Europe. C'est pourquoi dans cet hommage, rendu aux Medicis de Florence et de Paris comme à la création de ce musée du palais du Luxembourg, il eut été souhaitable de la perpétuer. Il n'en est rien puisque les artistes de la 1ère moitié du 20ème siècle abondent. Ainsi de Léon Bonnat (†1922), Brancusi (†1957) Claude Cahan (†1954) Lovis Corinth (†1925) Degas (†1917) Maurice Denis (†1943) Derain (†1954) Klee (†1940) Kollwitz (†1945) Marie Laurencin (†1956) Léger (†1955) Lissitzky (†1941). Malevitch (†1935) Matisse (†1954) Mondrian (†1944) Moholy Nagy (†1946) Picabia (†1953) Rouault (†1958) Schiele (†1918) Spillaert (†1949) Torres Garcia (†1949) Valadon (†1938) Vlaminck (†1938) Vuillard (†1940) et Wols (†1951), sans parler des artistes décédés dans les années 60 mais ayant acquis une renommée internationale bien avant les années 50 : de Bissier (†1965), Blumenfeld (†1969), Victor Brauner (†1966), Chaissac (†1964), Otto Dix (†1969), Dubuffet, Duchamp et Fontana (†1968), Fautrier (†1964), Giacometti (†1966), Magritte (†1967), Poliakoff (†1969), Van Dongen (†1968), soit une très longue liste d'artistes historiques à laquelle il faudrait ajouter Hans Bellmer (†1975), Chirico (†1978), Max Ernst et Mondrian (†1976), Picasso (†1973) et Norman Rockwell (†1978) dont la toile, un triple portrait, est reproduite sur l'affiche du musée et sur la couverture du catalogue. Le nombre d'artistes d'aujourd'hui est peu élevé et ne représente pas les différents courants de notre époque. Il s'agit d'Adami, Alberola, Arman, Baselitz, Ben, Blais, Bogart, Botero, Boulatov, Chia, Clemente, Chuk Close, Tony Cragg et Cueco, Esther Ferrer, Fromanger, Nan Goldin, Hockney, Hucleux, Ming et 2 autres artistes chinois Yue Nun Juan et Yan Shaoben, Robert Morris, Claes Oldenburg et Orlan, Jean Pierre Raynaud, Cindy Sherman, Szafran et Thierry Vidé, soit 30 artistes contemprains sur 150. Pourtant davantage auraient pu répondre au propos : l'on songe immédiatement à Louise Bourgeois, Urs Luthi, Boltanski, Legac, à Michel Faublée, Gilbert et Georges, Pierre et Gilles et à bien d'autres encore.

Une exposition d'autoportraits contemporains à Lyon (ELAC, 1993) réunissait déjà 80 œuvres. Dommage que cette occasion, en ce lieu, soit manquée.

Le catalogue, très largement illustré - toutes les œuvres exposées y sont reproduites - prolonge et enrichit les temps de l'exposition; chaque reproduction est accompagnée d'une courte biographie et d'un long commentaire sur l'œuvre, un commentaire qui interroge le symbolisme de cet exercice particulier où le peintre se donne à voir. Commentaire malheureusement plus psychologique que pictural, qui cloisonne les œuvres dans des chapitres qui évacuent l'histoire de l'art au profit d'une approche subjective du sujet.

Si quelques artistes présentent ostensiblement les icônes de leur fonction - palette et pinceaux - , d'autres surprennent par un recours modeste à l'anonymat. En 1953, Picasso (l'ombre) et Magritte en 1966 (l'heureux donateur) choisissent de se représenter par la projection d'une silhouette humaine qui envahit la toile. De même Tony Cragg en 1981 trace sur le mur une forme humaine. C'est assez dire qu'au siècle de la photographie, le peintre est délivré de l'exploit de la ressemblance. Plus traditionellement, Adami, Alberola, Klee, Nusbaum se masquent ou jouent avec le masque. Certains usent de la mythologie et se métamorphosent en Neptune, pour Van Dongen en 1947, en "Imperial" (sorte de totem pré-colombien) pour Victor Brauner en 1947. Plus intéressants sur le plan pictural sont les autoportraits où l'artiste joue avec l'univers qu'il a créé. Marcel Duchamp n'inscrit sur la toile que son nom car il est intellectuellement son œuvre. Lucio Fontana peaufine cette idée et, en 1966, il inscrit aussi son nom sur la toile, mais à l'envers, utilisant pour ce faire un miroir qui engendre un espace virtuel. Il signe ainsi son "Concept spatial".

Plus formel, plus tactile, Arman (A. Robot, 1992) fixe sur la toile une accumulation de pinceaux et de déchets d'atelier qui rapelle le geste fondateur du Nouveau Réalisme au début des années 60. Botero (1992) nous renvoie à une nature morte dont les éléments - une cafetière, une guitare, une orange - sont si exagérement gonflés et arrondis qu'ils le désignent aussi sûrement que sa signature. Anonyme encore cet autoportrait d'Ensor qui en 1888 propose non sans humour et mélancolie, la vision d’un squelette : une toile intitulée "Mon portrait en 1960".

Ici ou là quelques peintres et photographes évoquent la fuite du temps (Esther Ferrer) et la mort qui nous guette (Andy Warhol, 1978).

Ce catalogue est à feuilleter comme un beau livre d'images. Dommage que dépourvu de clef de lecture codée par l'histoire, il ne facilite pas au lecteur non averti la traversée du champ de l'art contemporain.

Liliane Touraine
Arbois, septembre 2004

Moi! Autoportraits du 20ème Siècle, Cat Skira/Sénat Musée du Luxembourg,
Lire aussi :
Moi ! ou le XXe siècle caricaturé dans ses autoportraits
ISBN 88-8491-854-5, mars 2004, 296 pages, 163 illustrations en couleur, 39 eruos TTC.
Exposition à venir au Sénat :
Veronese profane, du 21.09.2004 au 30.01.2005
Henri Matisse, une seconde vie, du 16.03.2005 au 17.07.2005

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