Une foire
abondante
et de
qualité
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Amparo Sard
La directrice Rosina Gomez-Baeza nous offre une foire dynamique en constante progression, de par le nombre de galeries qui a triplé depuis sa création, une superficie quatre fois plus grande et un nombre d'entrées sept fois plus importantes, et, ce depuis sa création.
290 galeries sont représentées dont 88 galeries espagnoles, 28 galeries allemandes, 20 galeries mexicaines, 18 galeries françaises et les 136 galeries restantes de 32 autres pays étrangers. Elles offrent un panel de plus de 2000 artistes dans un lieu aux allées spacieuses, aérées. Tout un ensemble de manifestations nous est proposé autour de l'art contemporain.
Cette foire comporte plusieurs secteurs, "the blackbox@arco05" pour 16 galeries avec des projets utilisant les nouveaux multimédias et audiovisuels, "new territories" pour 51 galeries montrant de l'art émergent et expérimental, "2oslo5" pour les jeunes galeries prometteuses d'Oslo, "project rooms" pour 32 galeries avec des projets individuels, "arco latino", pour les jeunes artistes de moins de 40 ans des Caraïbes et d'Amérique Centrale, et "painting only" pour 4 galeries de Londres spécialisées en peinture. C'est aussi le troisième "forum d'experts", cycle de conférences et débats avec des artistes, conservateurs, critiques d'art, collectionneurs et directeurs de musée.
En parallèle, plusieurs expositions mexicaines se tiennent dans 16 centres d'art et institutions dans Madrid même, dont le Musée National du Centre d'Art de Reina Sofia (MNCARS) dans le nouveau bâtiment de Jean Nouvel inauguré le 22 juin dernier, - ses deux autres bâtiments étant encore en construction -, le Crystal Palace dans le parc du Retiro avec l'artiste Gabriel Orozco, le Centre Culturel Conde Duque avec Dataspace, la Casa Encendida avec de jeunes artistes mexicains, la Casa America avec les artistes Carlos Amorales et José Davila, ICO collections museum avec Jaume Plensa, Alcala 31 avec Tijuana sessions…
L'art est en constante effervescence dans la péninsule hispanique. Depuis la chute du franquisme, les musées, les centres d'art et les fondations telles que Coca-Cola, Juan March, Telefonica, la Caixa bank prolifèrent et n'hésitent pas à investir dans les œuvres d'art dès le premier jour… La fondation ARCO, cette année a un budget de 165.000 euros pour toute nouvelle acquisition et le Musée d'Art Contemporain de Castille-Leon (MUSAC), qui sera inauguré en avril prochain, investit pour un montant de 300.000 euros.
Amparo Sard
La galerie Lelong de Paris se met au goût de l'Espagne avec l'artiste Jaume Plensa, né à Barcelone en 1955, et qui vit entre Paris et Barcelone. Son œuvre "tatoo" est une sculpture monumentale représentant le corps d'un homme en résine gravée de lettres lumineuses de couleurs changeantes (100.000 euros). Il ne produit pas pour réaliser des objets, mais pour raconter des histoires en activant des réactions. Il a conquis une notoriété internationale avec de rigoureuses pièces de fonte ou de fer battu gravées sur la matière des mots, ou quand il s'agit de matière plastique, portant des lettres lumineuses au néon. Ces phrases, empruntées à différents poètes, jouent avec la transparence. L'artiste cherche à créer des tensions, jouer sur les forces, les proportions et le poids des matériaux. Il a exposé la première fois en 1979. Il a commencé à travailler le fer, puis la fonte ; ses recherches s'élaborent autour de la forme et de la lumière. Il exécute des pièces monumentales.
La galerie Ferran Cano de Palma et de Barcelone nous présente deux de ses artistes majorquins Pep Guerrero et Amparo Sard, assez remarquables. Dommage que ces deux dernières années, nous ne la voyons plus à la FIAC. Le premier, Pep Guerrero, né en 1966, peint des motifs de paysage, de rayures, de plantes sur différents supports, des commodes, des bancs, des chaussures, des sacs à main devenant des éléments de décoration. A ses débuts, dépourvu d'argent, ne pouvant s'acheter des toiles, il prit comme support des objets, l'effet est inattendu avec un succès indéniable. D'ailleurs le styliste Jean-Paul Gaultier acheta toute sa collection en 2002. La deuxième, Amparo Sard, née en 1973, développe dans son travail une réflexion sur la société, mais une société à entendre comme un tout qui contient des autres et des individus. Son travail est une critique d'une structure sociale en équilibre précaire à l'aube de ce XXIème siècle et d'une réalité contemporaine, à la fois proche et étrange. C'est un questionnement sur une perte d'identité individuelle au profit d'une idée communément entendue du succès. Son univers est fortement imprégné par la génétique et les progrès dans le domaine de la médecine. Après avoir longtemps travaillé avec des matériaux d'origine organique, Sard a trouvé dans l'outil informatique un médium privilégié pour créer des œuvres d'un style unique, une fusion complète entre forme et idée. Elle nous soumet un travail de photo papier percé et vidéo fort impressionnant. Cette artiste n'a jamais été présentée en France. Elle le sera par Pascal Vanhoecke, galerie Parisud à Cachan 94 à partir du 3 mars prochain, notamment par "I am swanped", une vidéo, un rendez-vous à ne pas manquer.
Jaume Plensa, "tatoo"
Dans le secteur "project rooms", la galerie Beaulieu Hoet Bekaert de Gand en Belgique nous présente Pietro Roccasalva, artiste italien né en 1970, qui vit et travaille à Milan. Son œuvre est une vidéo-laboratoire. L'incident extraordinaire de la "perte du centre" (l'excentricité) s'exprime dans le Centre de la Perte, dénommé Giocondità. Dans le workshop situé dans l'immeuble sont logés les Fisime di Zurvan (les caprices de Zurvan), une série de projets/processus dans lesquels une ou plusieurs peintures "pensent" une situation. Le résultat peut être défini comme une "situation d'œuvre" (situazione d'opera). Chaque phase de la création picturale a été inclinée vers un acte intrinsèque : des objets, des meubles, des moyens audiovisuels, des actions, des tableaux vivants, etc. semblent cohabiter avec les peintures, tout en activant le processus dans un environnement spatial, qui en même temps, est une œuvre lui-même. L'amplification multimédiatique (techniques digitales, etc.) et la structure publique du processus, ensemble, forment une présomption de l'incorporel. L'espace sombré, qui ne reçoit aucune attention, démontre définitivement l'importance de toute structure en face du mystère du rien. Les Fisime di Zurvan sont "des situations d'œuvres" formées par un seul processus surmontant les catégories de formes et d'événements dans une configuration musicale qui sort du commun.
Dans le secteur "arco latino", la galerie Terrano Baldio arte de Mexico nous présente Javier Marin, artiste mexicain né en 1962 : une tête humaine, sculpture en résine de polyester. Il expose et a fait sa réputation depuis l'âge de 20 ans. Son principal sujet d'inspiration est le corps humain. Il fait ressortir de ses modèles les imperfections, les douleurs, les affres et les joies de la vie. Il ne cache rien et ne cherche pas à embellir. En France, nous avons pu le voir en l'an 2000 à l'espace Pierre Cardin à Paris.
C'est une foire qui va de l'avant au fur et à mesure des ans, bien préparée avec une certaine innovation, qui ne stagne pas sur ses acquis. Un rendez-vous à ne pas manquer.
Elisabeth Petibon Paris, mars 2005
Pietro Roccasalva
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