LE MAGAZINE
d'ExpoRevue
Déconstruction du visuel chez Christopher Williams
 

Christopher Williams appartient à cette génération d'artistes américains formée par les principaux acteurs de l'art conceptuel. Sa pratique artistique, de même que celle de Jeff Wall, Ken Lum ou Roy Arden est structurée par un désir : celui de s'infiltrer au cœur de la société américaine pour en révéler les aberrations culturelles. Ce mouvement au cœur du système de représentation des médias, représentation désormais structurée par la puissance idéologique des compagnies, ce mouvement donc s'accompagne chez lui d'une grande méfiance envers un art qui serait désincarné, sans âme, sans beauté plastique.

Les photographies qu'il présente actuellement à la Galerie Marian Goodman sont magnifiquement réalisés. Le tirage, couleur ou noir et blanc, surprend par sa qualité. Un tabouret aux lignes pures est présenté trois fois. Chaque photographie varie imperceptiblement de sa suivante. L'objet ne répond pas tout à fait aux critères de présentation en vigueur dans les magazines. Ici, une ligne est trop accentuée. Là, l'ombre s'étend imperceptiblement vers la gauche déséquilibrant ainsi la composition. Sur le mur opposé, une rue de Chinatown aux couleurs chatoyantes. Les détails y apparaissent avec une précision stupéfiante. Chaque œuvre de cet artiste américain est une métaphore de la déformation subie par l'image aujourd'hui. Ses carcans sont nombreux. La camisole du réel n'est plus qu'illusion alors que la présentation marchande évoque sur un mode métaphorique les préceptes démocratiques de nos sociétés. Mais l'on sait, désormais combien tout cela n'est qu'illusion pour interdire toute pluralité, toute possibilité d'échapper à la normalisation nécessaire au marché.

L'œuvre de Williams est donc critique et politique. Elle tente de déconstruire l'ordre symbolique des représentations sociales. Construire un nouvel imaginaire est au prix de cette déconstruction.

D. S.

Christopher Williams, Galerie Marian Goodman, Paris 5e, France, jusqu'au 17 avril 1999.

Sommaire
Edito