Jean Rustin, Ne détourne pas le regardActualité de Jean Rustin, Museum de Reede, Anvers
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Jean Rustin
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C'est une première à Anvers. Exposer l'œuvre singulière de l'artiste français, Jean Rustin (1928 à Montigny-lès-Metz – mort à Paris le 24/12/2013). Il a commencé sa carrière dans l'abstraction dans les années 1950 pour virer de style dans les seventies en proposant des portraits de figures de nus, de corps vieillis, de personnages dans des attitudes prostrées, marqués par la souffrance, la douleur existentielle, un univers aux couleurs parfois terreuses ou très vives : rouge, rosé, gris-bleu. Des portraits situés dans des intérieurs quelque peu claustrophobiques. Il y a également de nombreux dessins en noir et blanc. Le parcours est très bien ponctué tout d'abord par de grandes toiles qui permettent de comprendre l'univers du peintre et de s'immerger dans son imaginaire et ses obsessions. Il donne à voir une certaine intimité, il nous renvoie à notre propre corps, aux images qu'on souhaiterait donner de notre physique. Rustin théâtralise le corps dans le tableau avec une certaine violence formelle qui l'habite. C'est une manière d'exorciser son inconscient, ses désirs et sa propre conception de l'érotisme, d'une certaine obscénité qui fait la part du sacré, de la sexualité et de "l'informe" au sens de Georges Bataille. "Une sorte d'animation interne, secrète, une frénésie essentielle, une violence s'emparant d'un objet, le consumant comme le feu" (in L'Érotisme). Dans la peinture de Rustin, nous avons à considérer un double espace du sacré : réel et symbolique, matériel et plastique. Et une certaine forme d'athéisme. Histoire du Musée de Reede. Le musée d'art graphique, Museum de Reede, qui est situé près de l'Escaut, non loin de la cathédrale d'Anvers, est une très belle institution privée et pleine de ressources qui a ouvert ses portes en juin 2017, par Harry Rutten. La magnifique collection est sous le signe de Goya, Rops et Edward Munch (il voyage à Anvers en 1885 lors de l'Exposition Universelle), avec une édition originale rare du Cri – lithographie en noir et blanc – (entrée en 2022 au musée) - le musée possède 41 œuvres de Munch, la plus grande collection publique en dehors de la Norvège. Il existe quatre exemplaires en "couleur" : deux à la détrempe, une version dessinée au crayon de couleur et un pastel. De la version lithographique en noir et blanc, Munch a tiré 30 exemplaires, dont 15 seulement sont exposés dans les collections de musées du monde entier, notamment au Museum of Modern Art (MoMA) et au Metropolitan Museum of Art de New York, à la National Gallery de Washington et au Munch Museet d'Oslo. Jean Rustin disait : "L'image que chacun de nous a du corps nu - le sien ou celui de l'autre - est une image ultime, variable, malléable, une création de l'esprit et du désir, un concept presque abstrait (tellement il est chargé d'affectivité) propre à chacun de nous." L'artiste Jean Rustin a mis inlassablement à nu le corps humain dans tous les états peu ordinaires du quotidien. Sous une lumière crue, corps féminins et masculins pris dans les moments les plus intimes de la réalité. On peut évoquer Lucian Freud pour la mise en scène de la vieillesse. N'a-t-il pas mis en scène son autoportrait nu dans des godillots verts sans lacets : un clin d'œil aux souliers de Van Gogh ? La palette à la main et son couteau de peinture. Rustin a le regard cruel, d'une certaine violence scopique, avec ses modèles comme Lucian Freud. Chair et viande. Ce sont des sujets peu plaisants à regarder par leur densité. L'esprit qui circule chez Rustin inclut la difformité. Il individualise à l'excès le modèle qu'il a sous les yeux. La multiplicité infinie des caractères de la nature. Les couleurs des sujets sont ocres, grises, vert d'eau, rouges. Rustin s'approprie avec force l'animalité, le visage, le regard sur la monstruosité, tel un prédateur. Même si la vie est parfois hideuse, puissante, excessive apparemment, elle reste désirable dans ses diversités biologiques. Dont acte. Une exposition à voir absolument. Patrick Amine
Anvers, novembre 2025
Jean Rustin, Ne détourne pas le regard, du 05.09. au 24.11.2025
Museum de Reede, Anvers, Ernest Van Dijckaai 7, 2000 Antwerpen https://museum-dereede.com/fr/
Actuality from Jean Rustin :
"Jean Rustin said: "The image that each of us has of the naked body - our own or that of another - is an ultimate image, variable, malleable, a creation of the mind and desire, an almost abstract concept (so charged is it with emotion) unique to each of us." The artist has tirelessly laid bare the human body in all the extraordinary states of everyday life. Under harsh light, female and male bodies caught in the most intimate moments of reality. One might evoke Lucian Freud for his staging of old age. Did he not stage his nude self-portrait in green unlaced boots: a nod to Van Gogh's shoes? Palette in hand and his painting knife. Rustin has a cruel gaze, of a certain scopic violence, with his models like Lucian Freud. Flesh and meat. These are unpleasant subjects to look at due to their density. The spirit that circulates in Rustin includes deformity. He individualizes to excess the model he has before his eyes. The infinite multiplicity of nature's characteristics. The colors of the subjects are ochre, gray, water green, red. Rustin forcefully embraces animality, the face, the gaze upon monstrosity – like a predator. Even if life is sometimes hideous, powerful, seemingly excessive, it remains desirable in its biological diversities. So be it." Patrick Amine |