Cy Twombly
Photographs 1951-2010
Cy Twombly
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Cy Twombly

Cy Twombly, Untitled (Rome) 1966
Sammlung Lambrecht-Schadeberg / Rubenspreisträger der Stadt Siegen im Museum für Gegenwartskunst

 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
A Bozar, l'exposition Cy Twombly permet encore de garder un lien privilégié avec lui au delà de sa mort, en juillet 2011. L'itinéraire conduit nos pas dans ses pas, puisqu'il a choisi les photos ici proposées, une rétrospective de 1951 à 2010, sélectionnées dans l'optique d'une publication de cette partie de son oeuvre moins connue. Pour certaines d'ailleurs, peut-on encore parler de photos ? Que reste-t-il des polaroïds initiaux, agrandis à la photocopieuse, tirés à sec et aux pigments sur des cartons, où les proportions et les flous ont métamorphosé la première vision ? Le brillant et le format du premier état ayant disparu, la matière en relief de la surface cartonnée, mate, tend à faire glisser le sujet photographié vers la peinture ou le dessin, même si la spécificité photographique résiste le plus souvent.

Rarement isolés, les clichés sont regroupés aux cimaises, formant des compositions, des correspondances qui associent 3 photos d'un temple à Agrigente à un détail de tableau, ou un coucher de soleil à 3 détails de tableau, le même peut-être. Ces séries peuvent investir un sujet commun, donnant à voir divers états de feuilles éparses de citron ou le parti pris d'une histoire naturelle revisitée sur quelques arbres d'Italie. Twombly dresse à sa façon un inventaire de feuilles affirmées, effacées, aux couleurs indécises ou cernées, et les noms en latin, quercus, ficus, laurus nobilis, écrits de sa main, virent à la trace. Impossible de ne pas rester à contempler ses tulipes, troublé par leur ambiguïté organique, comme on le sera par les entrelacs sanglants de ses roses. Ailleurs, c'est une déclinaison de choux qui nous rassurera, ou le cône subtil d'un datera angel's trumpet. Lorsque la végétation ne se fait plus singulière, on est à nouveau désorienté par des landscapes réduits à des frondaisons, où l'oeil croit voir des formes humaines dans leur mouvement figé, saisies au plus près de leur mouvance aléatoire, comme une écriture au sens définitivement caché. On finirait même par trouver les nuages de feuilles ou les surfaces striées des arbres menaçants, s'il n'y avait le calme du ciel, seule tache claire qui donne à comprendre l'échelle de l'espace.

Twombly photographie aussi son entourage, d'incongrues pantoufles lyberty intitulées "Les chaussures de l'artiste" aux objets accumulés dans son atelier de Lexington en Virginie (que le film de Tacita Dean nous a rendu familier par la longueur de ses plans). Sans afféterie, il renouvelle ce topos de l'atelier d'artiste, puisque le flou, le cadrage avec lequel il rend compte d'une table surchargée ou de ses pots de pinceaux empêchent toute visée documentaire ou narcissique, toute projection signifiante. Ses sculptures semblent hésiter sur leurs socles, et comme celle qu'on peut voir dans l'exposition, elles rentrent en questionnement avec le reste de son travail, nous laissant dans la difficulté de trouver le lien.

Ses photographies d'intérieurs souvent obscurs, troués des rectangles clairs des portes, des vitres, d'emboitement de pièces en perspective contrastent avec celles prises dans la lumière de l'Italie, extérieurs saturés de soleil sur les pierres de marbre (matériau ou déchets ?), espaces habités ou de travail momentanément désertés.

En fin de visite, on se laisse prendre par un triptyque d'une forêt qui se dresse à mi-mesure du cadre, et dont la ligne de fond est densifiée par une colline, ne permettant aucune perspective, et le végétal impose sa présence immanente. Le parcours nous a mené d'un premier coucher de soleil en noir et blanc à un dernier en couleurs, dont l'opalescence sépia semble prémonitoire d'un adieu.
 
Dominique Lacotte
Bruxelles, mars 2012
 
 
Cy Twombly. Photographs 1951-2010, jusqu'au 29 avril 2012
Palais des Beaux-Arts, Rue Ravenstein 23, 1000 Bruxelles
tél. : +32 2 507 82 00 - www.bozar.be

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