Miroslaw Balka
London, Tate Modern, Turbine hall 2009
anglais
 
 

Miroslaw Balka

Turbine hall, Miroslaw Balka

 
Cohérence d'une programmation réputée pour ses œuvres monumentales. Chaque année le Turbine Hall est un rendez-vous attendu.

Les installations du Turbine Hall sont toujours aussi radicales. Par leur gigantisme, elles nous confrontent à une appréhension d'un espace hors de mesure.
Qu'elles soient ludiques avec les toboggans de Carsten Holler (2006), stellaires avec le Weather Project d'Olafur Eliason (2003), ou minimalistes avec la fissure de Doris Salcedo (2007) dont la marque scarifie encore le sol du Hall, toutes les installations de la série Unilever portent en elle un champ d'expérimentation purement physique, propre à nous marquer d'une manière unique.
Au-delà de cette première approche expérimentale et sensorielle et du retentissement qu'elles peuvent générer en chacun, émerge toujours une lecture plus politique de ces "jeux" apparents.

Au Coeur du ventre noir…
Caverne de Platon ou expérience du trou noir, le container de Miroslaw Balka nous saisit d'abord le corps et l'esprit et nous confronte à nos limites.

En pénétrant cet espace sépulcral, d'où pas l'once d'une lueur ne sort, on se sent d'emblée confronté à une peur archaïque, la peur du noir, émergence d'une claustrophobie latente et on peut observer la confrontation de cette anxiété à la raison pure, qui argue que tout cela n'est qu'un jeu. Les comportements diffèrent, cris excités des jeunes qui jouent avec leur peur, silence oppressé d'autres explorateurs de ce ventre noir; comédie humaine et ses faux semblants de bravoure.

Miroslaw Balka est né in 1958 en Pologne, où il vit et crée, proche de ses racines, proche de l'Histoire. Son travail s'apparente à l'Arte Povera, par nécessité; il confirme avoir depuis toujours créé avec ce qu'il lui "tombe sous la main". Dans son univers, ses vidéos, installations ou sculptures, il explore les croisements entre l'histoire individuelle et l'expérience collective et puise dans ses racines catholiques et dans les fractures historiques de son pays, une sensibilité empathique et autobiographique.

Cette installation porte en elle une dimension historique latente, que la vidéo présentée au deuxième étage du Tate Modern permet de mesurer plus amplement, relayant notre propre imaginaire. L'artiste nous dévoile son univers de référence et son projet d'installation, et lui donne une perspective historique plus profonde.
Il nous emmène en train vers Treblinka, voyage sombre sous une pluie drue, un ciel gris, plombé, sans espoir, d'une voix monocorde il investigue, se projette dans les pensées hypothétiques des déportés, embarqués à l'aveugle dans ces trains de la mort. Il explore leur solitude, leur angoisse leurs espoirs. Voix-: "ils ne vont pas nous faire de mal, ils peuvent avoir besoin de nous, on peut encore être utile, travailler, il n'y a aucune raison que ça se passe mal…" Balka explore l'absurde. Balance entre l'angoisse et l'espoir des déportés sans âges, anonymes, mais si proches. Nous immerge dans leur cauchemar. Leurs questions deviennent nôtres.

Face à l'impensable, il psalmodie qu'ils ont peut-être gardé espoir, jusqu'à la fin, jusqu'à la douche finale.
 
Edith Herlemont-Lassiat
Londres, novembre 2009
 
 
Tate Modern de Londres du 13 Octobre 2009 au 5 Avril 2010
www.tate.org.uk/modern/

Miroslaw Balka

Turbine hall, la fissure de Doris Salcedo

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