SurréalismeCentre Pompidou Paris
Surréalisme, Claude Cahun (Lucy Schwob, dite) Le Coeur de Pic, 1936
Surréalisme, Victor Brauner, André Breton, Oscar Dominguez (Oscar Dominguez-Palazon, dit)
Surréalisme, Dora Maar, Sans titre [Main-coquillage] 1934
Surréalisme, Giorgio De Chirico (Grèce) Le chant d'amour, 1914
Surréalisme, Grace Pailthorpe (Royaume-Uni) May 16, 1941
Surréalisme, Joan Miró (Espagne) Femmes encerclées par le vol d'un oiseau, 1941
Surréalisme, Joyce Mansour, Untitled (Objet méchant) 1965-1969
Surréalisme, Leonora Carrington, Green Tea (La Dame ovale) 1942
Surréalisme, Max Ernst, L'ange du foyer (Le triomphe du surréalisme) 1937
Surréalisme, Remedios Varo, Celestial Palubum, 1958
Surréalisme, René Magritte, L'Empire des lumières, 1954
Surréalisme, René Magritte, Les valeurs personnelles, 1957
Surréalisme, Salvador Dali, Rêve causé par le vol d'une abeille autour d'une pomme-grenade
Surréalisme, Salvador Dali, Visage du grand masturbateur, 1929
Surréalisme, Suzanne van Damme (Belgique) Composition surréaliste, 1943-1947 |
"Qu'est-ce que le surréalisme ? (…)
C'est l'œuf de coucou déposé dans le nid (la couvée perdue) avec la complicité de René Magritte. C'est réapprendre à lire dans l'alphabet d'étoiles d'E.L.T. Mesens. C'est la grande leçon de mystère de Paul Nougé". André Breton Surréalisme. Ithell Colquhoun, Scylla, 1938. Ph © Tate
Après l'exposition de Bruxelles intitulée : Imagine ! 100 ans de surréalisme international, aux Musées royaux des Beaux-Arts de Belgique (MRBAB- 21/02/ au 21/07/2024), l'exposition avait pour but de mettre en lumière la création artistique surréaliste, sous l'angle de la pensée symboliste, dans un contexte international (commissaire : Francisca Vandepitte). Le centre Pompidou et ses commissaires développent une autre approche (avec notamment quelques œuvres présentées à Bruxelles comme les Magritte), en y apportant d'autres oeuvres, divers documents, et le manuscrit original du Manifeste du surréalisme (1924) de Breton, montré dans une sorte de tambour central lumineux, visible après avoir franchi l'entrée de l'exposition décorée d'une porte aux allures d'une tête de monstre – qui rappelle l'entrée d'un cabaret fréquenté par les surréalistes à Pigalle… évoque le cabaret L'Enfer (voir image en fin des notes), situé sous les fenêtres de l'atelier d'André Breton … (cette bouche monstrueuse n'est pas sans évoquer aussi la fameuse sculpture des jardins de Bomarzo (le sacro bosco, bois sacré, près de Viterbo, dans le Latium), intitulée la porte des Enfers…). Dans ce couloir très peu éclairé figurent les portraits des principaux acteurs historiques de l'Histoire. La circulation est réalisée sous la forme d'une spirale ou d'un labyrinthe. Le but étant peut-être de s'y perde autour des 13 thèmes inscrits dans l'espace.
L'exposition célèbre l'anniversaire du mouvement né avec la publication du Manifeste du surréalisme d'André Breton, prêt exceptionnel de la Bibliothèque nationale de France, (voir la publication en Pléiade des manifestes) et retrace plus de quarante années de cette effervescence explosive et créative, de 1924 à 1969. (1) Cette exposition est divisée en treize chapitres aux thèmes aussi divers que : Cosmos, Lautréamont, Alice, Mélusine, Les larmes d'Éros, Monstres politiques, la pierre philosophale, Hymnes à la nuit, forêts, entrée des médiums, le royaume des mères, chimères, trajectoire du rêve… (présence de Freud), où sont rassemblées des tableaux, des sculptures, des œuvres visuelles, extraits de films, collages, dessin, photo et des textes divers relatant l'histoire du mouvement. Comme l'était celle de Bruxelles. On verra des œuvres, pour certaines assez connues, d'autres peu montrées (appartenant aux réserves du centre Pompidou) : le manifeste du surréalisme manuscrit, Dali, Brauner, Dotothea Tanning, De Chirico, Dora Maar, Picasso, une œuvre de Jorge Camacho (de 1972), Magritte avec "Les valeurs personnelles", de 1952 ; Claude Cahun, et nous pouvons découvrir surtout trois œuvres de l'étonnante Ithell Colquhon (2), artiste peintre et femme de lettres née le 9 octobre 1906 à Shillong (Inde) et décédée en avril 1988 en Angleterre. Dès les années 1930, son œuvre est exposée en Grande Bretagne et en Allemangne. Une révélation. Suivent les œuvres de Leonora Carrington, Masson, Miró, Man Ray, Max Ernst – notons qu'Aragon avait connaissance des collages de Max Ernst dès 1923 – Edith Rimmington, Jacqueline Lamba, la femme d'André Breton, Suzanne Van Damme… On regrette le manque d'images et d'écrits d'Artaud qui a appartenu au groupe et qui dirigea la revue La Révolution surréaliste. Même si Breton fut contraint de faire une rupture avec lui ; mais dans le second manifeste du surréalisme, il revint sur l'importance de l'auteur de L'Ombilic des limbes et du Pèse-nerfs. Et nous verrons aussi un dernier surréaliste encore vivant : Jean-Claude Silbermann, avec des découpages intitulées Alice. Le mouvement a certes continué à travers le temps. Il suffit de se rendre compte des œuvres encore présentes sur la scène contemporaine notamment en Belgique. Il y a aussi Toyen ; l'accent est mis sur des œuvres de femmes telles que Remedios Varo, l'étonnante Jane Graverol que l'exposition de Xavier Canonne avait bien mis en valeur à Bruxelles ; Maria Izquierdo, Rita Kernn-Larsen, Helen Lundeberg, etc. Aragon écrivait à propos des collages surréalistes dans La peinture au défi (1930), ceci : "On s'étonnera peut-être que l'évolution du concept des "collages" (système pictural introduit vers 1910 par les cubistes, comme une autocritique, sous le nom de " papiers collés ", système qui est à l'origine de diverses variations techniques dans le tableau, le papier cédant la place à des matières variables ou à des objets m'apparaisse à moi qui ne suis pas même un peintre un test significatif de ma propre aventure spirituelle." Et plus loin : "Néanmoins, il n'existe aucune explication satisfaisante de la naissance des collages. Le défi porté à la peinture en la soumettant à l'objet collé, quel qu'il soit, en lui faisant obligation de se mettre au pas de cet objet, d'avouer qu'il est plus impossible d'imiter un en-tête de journal ou une plume que le bruit du tonnerre et la lueur des éclairs, garde jusqu'à présent ses couleurs de vertige." Nous connaissons la suite des pratiques : écriture automatique avec le fameux livre : Les Champs magnétiques écrit par Breton et Soupault (écrit en 1919 et publié en 1920), où l'on aperçoit déjà les citations qui font partie intégrante du texte, notamment de Lautréamont : "lorsque les grands oiseaux prennent leur vol, ils partent sans un cri et le ciel strié ne résonne plus de leur appel. Ils passent au-dessus des lacs, des marais futiles : leurs ailes écartent les images trop langoureuses". Rappelons que la dernière exposition consacrée au mouvement surréaliste au Centre Pompidou date en effet de 2002. Depuis, le Centre Pompidou a organisé des expositions thématiques : "La subversion des images", "Le surréalisme et l'objet", "Art et liberté") et des monographies ("Dali", "Magritte", "Dora Maar"), mais il apparaissait nécessaire de présenter à une nouvelle génération une exposition sur l'ensemble du mouvement, à l'aune des recherches récentesqui ont été menées tant dans les musées que dans les travaux universitaires. Longtemps, le surréalisme a été considéré comme un mouvement d'avant-garde qui aurait pris fin en 1940. Cela revient à l'amputer d'une moitié de son histoire, puisqu'il se poursuit, au moins, jusqu'en octobre 1969, date de sa dissolution officielle. Il apparaissait donc essentiel de considérer le mouvement dans son ensemble, en accordant au surréalisme d'après-guerre la place qui lui revient. Comme le rappelle Marie Sarré, la commissaire associée. "Fidèles [aux précédentes expositions surréalistes], l'exposition "Surréalisme" propose une approche thématique qui cartographie l'imaginaire poétique du mouvement." Cette exposition permet à de nouvelles générations de prendre connaissance d'un mouvement artistique et littéraire qui a marqué la culture mondiale. En revoyant certaines œuvres et en découvrant de nouvelles peu connues qui ont été créées par l'esprit surréaliste, cet ensemble montre à quel point les créations de ces époques restent toujours modernes et pleines d'échos pour notre imaginaire et réactivent ainsi notre mémoire et nos engouements de jeunesse. Patrick Amine
Paris, septembre 2024 Surréalisme Centre Pompidou Paris, jusqu'au 13 janvier 2024 www.centrepompidou.fr Surréalisme. Façades des cabarets de l'époque, Bd. de Clichy, 1909 Notes diverses Surréalisme & Cie : Commissaires de l'exposition : Didier Ottinger, directeur adjoint du Musée national d'art moderne, et Marie Sarré, attachée de conservation au service des collections modernes, Centre Pompidou. (1). Le catalogue Surréalisme, sous la direction de Didier Ottinger et Marie Sarré. 22 × 32 cm, 344 pages. 49,90 €. Écrits : Collection d'anthologie du Centre Pompidou Les Magiciennes, Surréalisme et alchimie au féminin, Leonora Carrington, Ithell Colquhoun, Remedios Varo, anthologie par Marie Sarré 19 × 12 cm. 120 pages. 14,50 €. Le podcast est disponible sur le site internet du Centre Pompidou et sur toutes les plateformes d'écoute. Ouvrage : L'Atelier d'André Breton, Centre Pompidou Ed. (1). André Breton, Manifestes du surréalisme, Tirage spécial, Préface de Philippe Forest,parution le 19 Septembre 2024,Bibliothèque de la Pléiade-1184 pages, ill., rel. Peau. Signalons l'exceptionnel ouvrage collectif : L'araignée pendue à un cil, 33 femmes surréalistes, Anthologie éditée par Marie-Paule Berranger, Poésie-Gallimard, une anthologie avec des textes très peu connus. 2024. Pierre Drieu La Rochelle, Trois lettres aux surréalistes, avril 2024. Edition présentée et annotée par Bertrand Lacarelle. Coll. Les Cahiers de la NRF. "En août 1925, moins d'un an après la parution du Manifeste du Surréalisme, Pierre Drieu la Rochelle publie "La Véritable erreur des surréalistes" dans La Nouvelle revue française. C'est la première des trois lettres ouvertes que Drieu adresse au groupe d'avant-garde dont il est le témoin attentif depuis 1916, et sa rencontre décisive avec Louis Aragon. En sa compagnie, le futur auteur de Gilles et du Feu follet participe à l'aventure Dada à Paris, à celle de la revue Littérature, et à la naissance du surréalisme. Ses Trois lettres aux surréalistes révèlent qu'il a failli tout miser sur le mouvement d'André Breton, au cœur de ses "Années folles" qui furent des années de crise." – Autre exposition à voir : Des surréalistes à la NRF. Des livres, des rêves et des querelles (1919 – 1928) à la Galerie Gallimard, 30 rue de L'université, 75007 Paris, du 5 sept au 12 octobre 2024. Documentaire "Révolutions surréalistes" sur ARTE, un documentaire en deux parties qui retrace l'histoire du mouvement. Les dimanches 8 et 15 septembre 2024, et en replay sur ARTE.tv "Révolutions surréalistes". Le temps des provocations 1917-1929 (ep.1) Le temps de la Résistance 1930-1966 (ep.2) Coproduction : ARTE France, Siècle Productions, Centre Pompidou, 2024. Fidèle au principe de pluridisciplinarité qui caractérise les expositions du Centre Pompidou, l'exposition "Surréalisme" associe peintures, dessins, films, photographies et documents littéraires. Elle présente les œuvres emblématiques du mouvement, issues des principales collections publiques et privées internationales : Le Grand Masturbateur de Salvador Dalí (Musée Reina Sofía, MAdrid), Les Valeurs personnelles de René Magritte (SFMoMA, San Francisco), Le Cerveau de l'enfant (Moderna Museet, Stockholm), Chant d'amour (MoMA, New York) de Giorgio de Chirico, La Grande Forêt de Max Ernst (Kunstmuseum, Bâle), Chien aboyant à la lune de Joan Miró (Philadelphia Museum of Art), etc. Après Bruxelles, 21 février – 21 juillet 2024, Musées royaux des Beaux-Arts de Belgique à Bruxelles, 4 février "11 mai 2025 - Fundación MAPFRE à Madrid, Espagne Commissaire : Estrella de Diego 12 juin – 12 octobre 2025 - Kunsthalle de Hambourg, Allemagne, Commissaire : Annabelle Görgen-Lammers - Fin 2025 – Début 2026 Philadelphia Museum of Art, Philadelphie, États-Unis, Commissaire Matthew Affron. (2). Notes sur Ithell Colquhoun : Proche du mouvement surréaliste français, influencée notamment par Salvador Dalí, la Britannique Ithell Colquhoun reste moins connue que sa compatriote Leonora Carrington. Pourtant, ses œuvres qui explorent à la fois la sexualité, l'occulte et les rêves, sont fascinantes. Avant une large rétrospective londonienne prévue pour juin 2025 à la Tate, l'artiste est à l'honneur dans l'exceptionnelle exposition "Surréalisme". Ithell Colquhoun, née le 9 octobre 1906 à Shillong (Meghalaya, Inde) et décédée le 11 avril 1988 en Angleterre, est une peintre et femme de lettres surréaliste britannique. Des années 1930 à sa mort, son œuvre a été largement exposée en Grande-Bretagne et en Allemagne. Ithell Colquhoun inventa de nouvelles techniques surréalistes, comme la graphomanie, la stillomanie et le "parsemage". Elle était aussi romancière, dramaturge, et poétesse. |