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Connaissez-vous des artistes-plumassiers ? Il n'est pas fréquent de rencontrer des artistes qui travaillent avec des plumes d'oiseaux… Nous avons rencontré Nelly Saunier qui en fait son métier d'art. Elle travaille depuis de nombreuses années dans ce domaine en créant des œuvres et des installations aux destinations diverses, et notamment pour les couturiers ou pour la joaillerie ! Artiste étonnante qui a choisi sa vocation de plumassière à l'âge de 14 ans et qui s'est dédiée totalement à cette discipline et en l'ouvrant au domaine des arts plastiques.
Que dit le dictionnaire ? Il donne cette définition : Plumasserie, subst. fém.Travail, métier du plumassier; commerce des plumes.
Dans le cadre de l'exposition "Mucicanimale", les commissaires (1) lui ont demandé de créer des œuvres autour de la figure de Papageno, célèbre homme-oiseau de La Flûte enchantée de Mozart (2). Deux œuvres seront présentées de sa collection "Nature Transformée", ce sont "L'Arbre Paon", et "Est et Ouest", pièce inspirée par le duo entre Papageno et Tamino. Nature transformée® est une série d'œuvres que Nelly Saunier a inaugurée sous le signe du détournement. Plumes métamorphosées. Elle "transforme" la technique, réinterprète les matières en jouant sur des effets de trompe-l'œil ; et d'une certaine manière, elle réinvente la nature pour créer un état poétique avec les éléments qu'elle assemble. Tout sous ses mains forme une métamorphose en mouvement. Elle élabore les suspensoirs de bois, les multiples présentoirs selon la manière de fixer ensuite ses compositions avec les plumes, suivant ses propres thèmes et son imaginaire. Son atelier est empli de boîtes de plumes qui proviennent de différentes espèces d'oiseaux. Elle est intarissable sur les provenances et les catégories de plumages. Nelly Saunier note : "Quand je pense aux parures de plumes me vient toujours deux images. Tout d'abord l'invention du signe politique d'Henri IV qui motive ses soldats pour la bataille d'Ivry en 1590 en s'écriant : "Ralliez-vous à mon panache blanc vous le trouverez au chemin de l'honneur et de la victoire".
Toute une histoire ! Nous savons qu'en partie : "Ce métier est resté très féminin. Le nombre de plumassières parisiennes est passé de 425 en 1919, à 88 en 1939 et 5 en 1980. La profession perdure à travers quelques rares professionnels de la haute couture, du spectacle ou de la création. Actuellement, seules quatre entreprises subsistent à Paris. Certaines maisons travaillent avec le Moulin Rouge et d'autres music-halls haut de gamme. Dans les années 1980 apparaît la concurrence asiatique. Pour faire face à ce phénomène, la fabrication de vêtements en plumes et la teinture sont automatisées grâce à des technologies de pointe." De nos jours, il ne reste que 4 sociétés. Ainsi, parallèlement à ces maisons, moins d'une dizaine de professionnels exercent en tant que créateurs indépendants. (3)
Nelly Saunier imagine constamment de nouvelles œuvres. Sa participation à l'exposition MUSICANIMALE va révéler son originalité et sa singularité parmi les artistes invités. Prochainement, nous la retrouverons certainement dans une galerie où elle pourra montrer un éventail de ses créations, et, sans doute dans une nouvelle exposition collective.
Une œuvre à suivre tout emplie de charmes qui fascine notre regard.
Patrick Amine
Paris, septembre 2022
Musicanimale, le Grand Bestiaire Sonore
Nelly Saunier Artiste plumassière
Exposition à la Philharmonie de Paris
Musée de la Musique - Philharmonie de Paris.
du 20/09/2022 au 29/01/2023
Catalogue de l'exposition, Ed. Gallimard, 208 p.
philharmoniedeparis.fr/fr/musee-de-la-musique
MUSICANIMALE, Le Grand Bestiaire sonore - 20 septembre 2022 au 29 janvier 2023 –
Catalogue : Editions Gallimard, Musée de la Musique|Phiharmonie de Paris. Illustrations de Julien Salaud. 208 pages. Gallimard.fr
L'exposition Musicanimale aborde le thème de la bioacoustique à la Philharmonie, il s'agit d'écouter le vivant : vocalises d'oiseaux, stridulations d'insectes, chants mélodiques de baleines, hurlements chorals de loups… Tout en montrant l'influence extraordinaire des voix animales dans l'histoire de l'art et de la musique, le parcours questionne le devenir de la biodiversité et la disparition d'un patrimoine sonore en danger. Des toiles d'araignée musicales de Tomás Saraceno (On se souvient de sa grande exposition au Palais de Tokyo en 2019), aux natures transformées de Julien Salaud (artiste découvert au salon de Montrouge il y a quelques années déjà, il a été montré également au musée de la Chasse et de la Nature à Paris) ; on le retrouve ici avec d'innombrables œuvres dessinées et peintes ; avec aussi Erik Nussbicker, toujours avec son cerf éclaté, Anri Sala, Alain Séchas, Knud Viktor pour ses sons d'insectes enregistrés dans la nature, une expérience de plus de trente années de recherche, et la Vox Balaenae de George Crumb aux vocalises d'Yma Sumac ou de Meredith Monk.
On verra "Love Saves Life" de Maurizio Cattelan, une œuvre de 1995 où il superpose sur un âne : un chien sur lequel il y a un chat où est installé un coq ! Et bien sûr les chats d'Alain Séchas, et toutes les images de singes musiciens extraites du corpus de la peinture facétieuse classique. Surprenantes également, ce sont les œuvres "étranges" du groupe TOUT/RESTE/À/FAIRE (trois artistes) qui réalisent des constructions instrumentales hybrides, animales et musicales.
Parmi cet ensemble, des œuvres classiques recoupent la thématique, tels les oiseaux d'un Frans Snijders (17ième) ; la Serinette de Chardin, des œuvres flamandes, et des sculptures de diverses provenances, etc. Des partitions musicales (Messiaen, avec Le Réveil des oiseaux), Saint-Saëns, tout un ensemble sonore évocateur des émissions sonores des animaux. Il s'agit dans cette de montrer comment l'éco-acoustique a permis de mieux comprendre le comportement sonore des animaux et cela à travers l'évolution des espèces. Donc de faire écouter les émissions sonores des animaux dans la nature, de faire entendre un abécédaire sonore de 40 espèces, autour de 150 œuvres. Paysages sonores, fonds marins avec le chant des baleines, etc. Il y aura des concerts et des performances durant cette exposition ainsi qu'un nombre de concerts très intéressants. Voir le programme sur : phiharmoniedeparis.fr.
Parmi les textes des commissaires du catalogue, on trouvera d'autres contributions d'artistes.
Une exposition haute en couleurs et en musiques qui séduira les enfants, et comme on dit en Angleterre, une exposition pour les 8 à 88 ans !
1. Commissaires : Marie-Pauline Martin - Jean-Hubert Martin. En partenariat avec le Muséum national d'histoire naturelle.
2. Opéra joué pour la première fois en septembre 1791, à Vienne ; il meurt le 5 décembre. Papageno est l'oiseleur réduit au silence par les trois femmes émissaires de la Reine de la nuit. Puis il recevra un carillon magique avant de trouver sa Papagena…
3. Christian Dior disait : "Une femme peut porter des plumes avec distinction et élégance, à condition de les choisir petites et délicates."
Encyclopédie, 1ère édition (1751) : "PLUMASSERIE, s. f. est l'art de teindre, de blanchir & de monter toutes sortes de plumes d'oiseaux. Quoique cet art ne soit que de pur agrément, on ne peut nier que la société ne tire des avantages particuliers de l'industrie & du goût de ceux qui l'exercent ; les ambassadeurs, les rois, & les temples mêmes lui doivent leurs principaux ornemens, & il n'est point de cérémonie importante qui n'emprunte de lui une belle partie de sa magnificence."
"Plumes de coq ou de paon, de pintade ou de faisan, peu importe, l'essentiel, c'est qu'elles soient très résistantes grâce à la kératine qui les compose. Les plumes sont rigoureusement triées, sélectionnées pour leur stabilité, leur densité et leur finesse, nettoyées, stabilisées à la vapeur et retaillées à la main." Ainsi que le précise Hervé Borne dans un article. "En bref aujourd'hui les nandous, grèbes, albatros, pélicans, cigognes, flamants, canards et les oies, grues, perroquets, chouettes et hiboux, colibris, oiseaux de paradis sont strictement protégés. Même le ramassage des aigrettes tombées à la fin de la saison des amours est interdit en France. Les plumes utilisées par l'artisanat plumassier sont les déchets de l'industrie agro-alimentaire c'est de l'up-cycling ! Les importations doivent être strictement déclarées avec leur traçabilité. Les commerçants eux-mêmes sont très mobilisés." (…) "Le porté de plume est masculin et même guerrier. Déjà dans l'Antiquité, les casques des armées romaines étaient ornés de panaches. Encore aujourd'hui la garde républicaine, cette branche de la gendarmerie nationale qui assure les missions d'honneur et de sécurité pour les plus hautes autorités de l'État, porte des plumets sur ses casques. Il y en a même 5 qui indiquent la fonction ou le grade. L'aigrette en plumes de héron (hauteur de 315 mm) est réservée au commandant du régiment de cavalerie. Le plumet tricolore en plumes de nandou (315 mm), est celui des officiers supérieurs (chef d'escadron et ses supérieurs) et de tous les officiers de l'état-major. Les capitaines et lieutenants portent un plumet écarlate en plume de nandou (315 mm). Le trompette-major et son adjoint sont distingués par le tricolore en plumes de coq de 270 mm. Et tous les sous-officiers des unités ont droit au plumet écarlate en plumes de coq de 270 mm."
Histoire : "Le dictionnaire historique des arts, métiers et professions exercés à Paris depuis le XIIIe siècle" par Alfred Franklin indique que déjà sous Charlemagne les élégants se paraient de plumes de paon et de flamants roses. Au XIIIe siècle les prélats et grands seigneurs portaient des chapeaux ornés et parfois même formés de plumes de paon, à telle enseigne qu'en 1268 se forme la corporation des chapeliers de paon. Au XIVe siècle on voit apparaitre les plumes d'autruches. Louis XII entrant à Gènes portait un casque couronné d'une forêt de plumes droites d'où émergeait un panache retombant. Et François Ier arborait une plume blanche sur son bonnet de velours noir. La profession évolue et fait réviser ses statuts en 1599 et 1659 pour devenir "plumassier - panacher - bouquetier enjoliveur".
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