Hans op de Beeck, exporevue, magazine, art vivant et actualité

Le musée de Flandre est basé en France à Cassel, dans le Nord (réouvert en 2010). La commissaire et directrice du musée départemental, Cécile Laffon a précisé dans son introduction à l'exposition de l'artiste belge, la présence dans ce musée d'une collection de primitifs flamands ainsi que d'autres œuvres du XVIIe tels que : une vingtaine de tableaux attribuée aux plus grands noms de la peinture flamande : Hieronymus Bosch, Jan Brueghel, Peter Paul Rubens, redessine les contours du parcours, sous un angle essentiellement "Beaux-Arts". Il y a notamment des anonymes du 16e, des maîtres, on peut voir des madones aux enfants, un Rubens magnifique, qui a appartenu à Louis XIV, un prêt provenant du musée de Valenciennes, comme d'autres tableaux étonnants (Jan Mandyn) telle que cette vanité singulière (voir photo). Hans op de Beeck est né à Turnhout en 1969. (Il obtient le Prix de la Jeune Peinture belge, en 2001). L'artiste a saisi l'opportunité et la proposition de la commissaire pour créer des œuvres en résonnance à l'ADN du musée et à son ancrage à proximité de la frontière belge. Nous connaissons le travail de l'artiste belge dont la tonalité des sculptures proposées est toujours d'un gris bleuté. Les visages et les corps sont polies à la manière des sculptures antiques et de l'art italien. Il y a réalisé notamment des films vidéo où il mêle l'architecture intérieure, les paysages et des éléments étranges de la vie contemporaine, parfois surréalistes, des images glacées qui révèlent un regard ironique sur le monde (Sea of Tranquility - 2010). "Je cherche avant tout à conférer à une œuvre plastique, à un film ou à un spectacle une atmosphère pénétrante, qui rende l'œuvre immersive.", écrit-il. Il poursuit : "Cette œuvre évoquait un obscur musée fictif après les heures d'ouverture, comme si on visitait en secret, de nuit, un musée consacré au Titanic par exemple, avec une maquette démesurée du navire, les uniformes du personnel, le service en porcelaine affichant le logo de la compagnie, la projection d'un film et une foule d'autres objets évoquant l'univers du bateau et tout ce qui l'entoure." Dans un autre film vidéo, Staging Silence, Hans op de Beeck montre une séquence perpétuellement changeante d'archétypes de lieux, d'intérieurs et d'extérieurs qui sont à chaque fois construits et déconstruits, de- vant l'œil de la caméra, par deux paires de mains anonymes manipulant de petits objets provenant de la maison, du jardin et de la cuisine.

Dans les premières salles d'exposition, on retrouve des aquarelles de paysage, de bord de mer avec des vagues (On the Ocean), et des photos retravaillées de paysage de neige (Snow Landscape) qui jouent avec les tableaux des peintres du musée, tel que Patinir, par exemple. Ou bien ce bas-relief très beau : Archetypal landscape (sea view). Dans une autre pièce du musée, on verra une très grande vanité occupant presque entièrement l'espace (Vanitas XL), elle fait écho au petit tableau de Jacob van Es et dans une autre pièce au Trophée de chasse… de Jan Fyt – sans doute qu'elle aurait été plus lisible avec du recul pour le spectateur dans une plus grande pièce. Des sculptures répondent aux vanités, aux animaux dans certaines peintures de la collection, des figurines d'enfants, et cette fameuse danseuse dans son fauteuil, au grand chapeau de plumes, une création de cette année. Dans la pièce des Wunderkammer, cabinet de curiosités, l'artiste a imaginé une vitrine aux multiples objets/sculptures dans sa couleur grise. Gesture (2023) est une sculpture formée des bras et des mains d'une femme qui sortent d'un mur avec une fleur et une couronne de laurier, en références aux scènes mythologiques de la salle des Merveilles. La séquence de résonnances se termine avec ce grand cavalier, The Horseman, qui fait face à la peinture de Francis Tattegrain (1852-1915) d'une bataille en 1430 où Philippe le Bon, Duc de Bourgogne est venu mater une rébellion. Le tableau s'intitule : Les Casselois dans le marais de Saint-Omer se rendent à la merci du duc (1887). La directrice du musée, Cécile Laffon, précise la correspondance de l'œuvre de l'artiste avec la collection des peintures flamandes : "Son corpus semble tellement imprégné de références à l'art flamand, que naturellement, des liens se tissent avec les collections du musée. (…) Silence et résonance, font chacun référence à l'uni-vers de l'artiste".

Les œuvres de Hans op de Beeck invitent à une réflexion sur le monde contemporain et sa complexité. Il n'hésite pas à détourner les codes pour exprimer son point de vue. L'artiste est préoccupé par la manière de stimuler les sens et les perceptions du spectateur, en l'invitant à s'immerger dans les images. Ses fictions visuelles (ses nombreuses vidéos) délivrent par leur mise en scène une étrange atmosphère de fascination et de silence. Cette exposition est une manière de traverser le Temps à travers l'histoire de la peinture (les maîtres flamands) et le présent immédiat de notre artiste.