Daniel LocusAction (in)directe
Daniel Locus
Daniel Locus
Daniel Locus
Daniel Locus
Daniel Locus
Daniel Locus
Daniel Locus
Daniel Locus
Daniel Locus
Daniel Locus
Daniel Locus
Daniel Locus |
Si son mode opératoire est bien connu, ses objectifs paraissent plus flous. Poseur de bombes à fragmentations qui n'explosent qu'à bas bruits, c'est en réalité à chacun de nous qu'il entend infliger des peines incompressibles. Les dernières traces de luttes laissées par Daniel Locus, partisan d'une insurrection avec obligation de résultats, sont visibles à la galerie 100 Titres.
Photos, vidéos, installations et autres écrits : Daniel Locus fait régulièrement valoir l'une ou l'autre de ses observations, ici et là, en Belgique et ailleurs. Son intérêt à l'égard de ce qui se trame, dans la rue comme dans le milieu de l'art contemporain, motive sa présence sur différents fronts de la guérilla urbaine. Voilà des années qu'il contribue, avec autant de pugnacité que de discrétion, à la vitalité des pratiques artistiques actuelles dont l'enjeu est sociétal. Est-ce parce qu'il a son miroir en horreur et agit en autonomiste dans la furtivité ? on ne l'associe à aucune galerie en particulier. Sachant que la violence est un manque de vocabulaire, il préconise plutôt la digression pour justifier ses plasticages. Les combattants de l'ombre peuvent avoir de ces colères rentrées ! Artiste-citoyen, militant avec une remarquable subtilité dans l'art de revendiquer (plus de conscience et de sensibilité) et de dénoncer (les guerres, les inégalités), voici qu'il nous propose aujourd'hui certaines mesures de libération. Á condition de prendre connaissance d'un volumineux ouvrage édité en 2009 par la Galerie : "Histoires d'histoire" se pose en matrice du travail des mots et des images mené par l'auteur. Á côté de quoi l'on découvre de grands tirages photographiques et de plus petites photos associées au contenu du livre : Hiroshima, Guernica, Waterloo, … Autant de miroirs de certaines horreurs qui (ne) se passent (pas) de commentaires. Un texte de l'auteur inspiré par sa biographie y figure d'ailleurs, en grisaille et sans ponctuation, on peut l'entendre et le voir défiler au cours de l'expo. Un autre livre, publié pour la circonstance, contient notamment un texte magistral d'Aldo Guillaume Turin, lequel relève les "Soupçons de collusion avec le réel" qu'il nourrit à propos de Daniel Locus. Ailleurs, des "boîtes à lumière" noires où la photo se réfléchit sur un plexi trahissent encore la stratégie du combattant qui n'a pas déserté, brandissant posément ses appareils de capture d'images sur le champ de bataille, le paysage désolé que donnent à voir des scènes emblématiques puisées dans notre vie quotidienne. Ses photos de reliefs de repas et celles où, rassasié, le sujet se frotte la bouche au moyen d'une serviette sont des séries bien connues. "On est foutu, on mange trop" ? Cette question n'est pas assez oblique en l'occurrence. Ce qui retient surtout l'attention de ceux qui connaissent l'ironie conceptuelle de Daniel Locus est la nouveauté que constituent trois vidéos où sont projetés des mots en relation avec la couleur de chacun des fonds d'écran, respectivement bleu, rose et noir. Ces mots défilent à toute vitesse, le spectateur n'a pas le temps de les saisir et de les interpréter. Le mot "ciel" est-il bleu ? Le mot "avenir" est-il rose ? Nos maux sont-ils à attribuer à des humeurs noires ? Des séries de nuances, de jeux de langage, de collisions entre notre perception culturelle du verbe et des sens qu'il induit nous sont livrés par flashes : le geste d'un photographe qui a trouvé là le lieu (locus) où condenser les termes du débat qui l'anime et dont il nous fait sentir l'urgence par le biais de notre perception visuelle. Que ce soit par son implication dans le mouvement qui revendique la création d'un musée d'art contemporain suite à la fermeture du Musée d'Art moderne par Michel Draguet ; par son implication dans le comité de son quartier d'Ixelles ; par son implication dans le blog de délirurbain ; par son implication en tant qu'artiste, une chose est sûre, Daniel Locus ne fait rien à moitié et cela, dans un esprit de résistance à l'encre et à la pellicule que nous gâchons lorsque nous nous contentons de véhiculer passivement des clichés. Son parcours très documenté n'a de cesse, comme on peut le lire sur le site de 100 Titres, d'interroger le langage et la lecture de l'image. Ainsi mène-t-il pour le moment un travail de recherche sur l'évolution des surfaces utiles d'exposition à Bruxelles. Une recherche dont les conséquences ne manqueront pas d'évoquer l'action (in)directe de groupes d'artistes en résistance toujours aussi déterminés. Catherine Angelini
Bruxelles, février 2012
Daniel Locus, Horror[']s Mirror / Photographies, vidéos, installations
100 Titres - 2, rue Alfred Cluysenaar, 1060 Bruxelles, du 11/02 au 01/04/2012 www.100titres.be - exposition Daniel Locus chez Marchetti 2007 Texte paru dans l'Art même (n°54, 2012), 44, Boulevard Léopold II, 1080 Bruxelles www2.cfwb.be/lartmeme/ Histoires d’histoire a été tiré en 20 exemplaires numérotés et signés. Emboîté sous une custode de couleur évidemment rouge, il est édité par la Galerie 100 Titres dans la collection Ligne de tête et se vend au prix unitaire de 750 euros. |