Jacques Charlier MAC's 2016, exporevue, magazine, art vivant et actualité

Denis Gielen, nouveau directeur du MAC's, du Grand Hornu, prenait ses nouvelles fonctions en inaugurant l'exposition de l'artiste Jacques Charlier. Faisant suite à la direction de Laurent Busine, avec lequel il a travaillé une quinzaine d'années (son exposition de Pascal Bernier fait date), Denis Gielen a souligné les principes divers de ses choix, son engagement, et notamment le caractère singulier de Charlier comme une antidote dans le système des arts contemporains. Le regard critique que cet artiste a toujours maintenu contre vents et marées, en réinventant toujours ses directions artistiques et ses perspectives au fil de l'histoire depuis les sixties jusqu'à nos jours. Comme en témoigne cette rétrospective pleine de surprises basée sur de nombreuses thématiques.

Nous savons que Charlier a participé aux divers courants du Pop art avec son regard aiguisé, politique et ironique, comme avec son ami Broodthaers (bien sûr, plus âgé que lui) ; ensuite, il a accompagné les minimalistes tels que Kosuth, Buren, Toroni. Tout en gardant son côté rock !

Evidemment, dans cette exposition, la peinture reste ici omniprésente comme son titre l'indique hautement, mais Jacques Charlier nous a réservé une installation singulière : « La chambre des âmes », formant une illusion d'optique et d'échelle. Jacques Charlier a conçu cette exposition comme un scénario à plusieurs entrées, et cette «chambre » a été fabriquée tout spécialement pour le musée du Grand Hornu – une manière de parabole.

On peut dire d'une certaine manière qu'elle répond à travers le Temps, avec un décalage de propos, avec celle qu'il a installée lors de l'exposition de Jan Hoet, Chambre d'amis, à Gand, (en 1986) où il créa sa fameuse « Chambre d'ennemis » !

Le propos de Charlier a une résonnance « marxiste » parfois quand il analyse la situation du marché de l'art et ses développements. Il propose une autre réalité des faits et s'attache à montrer des images, par la peinture, par la fiction, qui révèlent des positions « alternatives », à la manière peut-être des situationnistes. Dans la galerie des peintures, la première salle des Fictions, il a inventé des peintres et des biographies inexistantes, en prenant comme support des cadres vides qu'il a peints avec tout l'humour que nous lui connaissons. C'est une suite de styles divers où la variété de la peinture exhibe des thèmes et des sujets les plus détonants et humoristiques. On pourrait dire comme Asger Jorn qu'il se propose de réaliser des tableaux où le style reste « indéfini » et diversifié, comme pour montrer qu'il est « contre le style ». Il passe en revue : l'anatomie, l'hypnose, la peinture Voyante, les peintres fractals, les peintures inqualifiables et les expressionnistes divers. Il y a aussi ces peintures Cannibales, où les viandes s'étalent… Les 4 Saisons, les abstractions géométriques ou bien ces hommages à Fontana, avec des petits tableaux cutterisés… Qui suivent les peintures italiennes tout au long des salles du musée avant d'arriver à la « Chambre d'Âmes », où en entrant nous perdons le sens de la réalité physique par les proportions et l'inclinaison du sol et la hauteur du rectangle.

Cette rétrospective permet de prendre la dimension de l'art de Jacques Charlier et de ses expériences avec la peinture et la société à travers plusieurs décennies. Son regard reste toujours plein d'acuité et de générosité. Il appartient à la riche Histoire de la peinture belge et européenne. Cette exposition en est une preuve.