Simon Mondzain |
Biographie |
Né aux alentours de 1888 à Chelm près de Lublin, en Pologne orientale sous administration russe, Simon Mondzain qui s'appelle encore Szamaj Mondszajn est issu d'une famille juive pieuse. Il se trouve jeune dans l'obligation de fuir son milieu pour accomplir une vocation de peintre qui apparaît aux yeux de sa famille comme un acte profane. À partir de 1905, après avoir quitté son village, il vit d'expédients jusqu'à ce qu'il entre à l'École des Arts et Métiers de Varsovie.
En 1908, une bourse, lui permet de poursuivre ses études à l'Académie Impériale des Beaux-Arts de Cracovie. Il étudie sous la direction de Józef Pankiewicz, peintre d'influence impressionniste, fréquente le milieu intellectuel polonais, et fait à l'Académie la connaissance de Kisling et du peintre polonais Zawado. Il émigre définitivement à Paris en 1912. Il rencontre André Derain qui devient son maître et exerce sur lui une forte influence. Peintre du Montparnasse des années vingt, il côtoie Picasso, Modigliani, Othon Friesz mais aussi Apollinaire.
Cependant, rétif aux avant garde de l'époque, il ne s'inscrit dans aucun courant, seuls les peintres de l'École de Paris peuvent le compter parmi eux. Il écrit dans ses carnets en 1920 : "Je suis resté méfiant envers le monde, j'ai toujours peur d'être renversé, c'est pour cela que dans chaque effort de mon art est souligné avec une force égale, soit un objet, soit un être humain. Il faut que chaque forme, chaque ligne, soit enfermée dans une forme nette, que rien ne la puisse renverser. Les figures doivent être formées d'une construction musculaire solide et où elles sont placés, elles ne peuvent être ailleurs : C'est là et non pas là. La certitude dans la forme est la seule vérité."
Engagé durant la Première Guerre mondiale dans la légion étrangère sous le drapeau polonais, il dessine sa vie de soldat dans les tranchées de Verdun. Évacué en 1917, il peint plusieurs toiles marquantes dont L'Homme à la lettre qu'il présente lors de sa première participation au Salon d'automne en 1919 et Pro Patria un pastel.
Il expose ensuite au Fine Art Club de Chicago en 1920, toiles et dessins, dont une première version du Grand Arlequin. Si la galerie Druet et la galerie Paul Guillaume l'exposent dès 1922, il est surtout présent dans les salons parisiens notamment aux Indépendants de 1920 à 1946. À partir de 1950, il se fait plus rare. Son mariage avec Simone Lemaire, médecin à Alger, l'amène à partir de 1933 à partager désormais sa vie entre Paris et l'Algérie, où il devient un intime d'Albert Marquet. En 1962, après l'Indépendance de l'Algérie, il s'installe définitivement à Paris jusqu'à sa mort en 1979, année où le Musée Granet d'Aix en Provence lui consacre une exposition, qui sera suivie d'une importante rétrospective en forme d'hommage en 1983.
En 1996, le musée Bourdelle présente certains de ses dessins et tableaux pour Paris et les artistes polonais 1900-1918, exposition qui sera reprise en Pologne. Or c'est seulement en 1999, à l'initiative de l'historienne d'art polonaise Elzbieta Grabska, qu'il retrouve véritablement Paris, l'Institut Polonais lui consacrant une rétrospective qui voyagera à la galerie d'art contemporain Zachęta de Varsovie, et au musée de Silésie de Katowice.
Sans particularisme identitaire, pas plus peintre polonais qu'algérois, Mondzain a su résoudre les contradictions d'une identité contrastée, polonaise, russe autant que française, tantôt mystique et gothique, tantôt réaliste et moderne, puis un temps orientaliste. Peu prolixe en propos et en expositions, il fût d'abord un peintre de paysages et de lumières, d'abord en Provence, puis en témoin contemplatif de l'Algérie des années coloniales entre 1925 et 1962, peignant le port et les ruelles d'Alger. Les années 2004 et 2005 marque son retour posthume sur la scène artistique française puisqu'on a pu voir un important accrochage au Centre Rachi à Paris, et également ses dessins de guerre et quelques unes de ses toiles lors de l'exposition : Juifs dans la Grande Guerre, 1914-1918 au Musée d'art et d'histoire du judaïsme.
Raya Baudinet, critique d'art et petite-fille de Mondzain