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Une année de transition :
Dès sa cinquième édition Frieze est appelée à gérer une contradiction délicate, être à même de présenter des pièces de Musée réclamées par les nombreuses institutions comme la Tate ou autres musées européens et présenter une offre de créations plus provocantes, plus vivifiantes mais plus risquées, en ligne avec le marché et la curiosité Londonienne.
Les choix des galeries ont d'ailleurs été plus sages cette année, tant dans la sélection des œuvres que dans celle des médias, davantage de peintures et de sculptures, moins de vidéos, d'installations et de photographies.
On peut aussi s'interroger quant à l'influence de l'économie mondiale récente sur leur stratégie. La faiblesse du dollar a rendu plus difficiles les ventes des galeries européennes aux collectionneurs américains, la crise monétaire du mois d'Août est la cause probable d'une conscience différente de la valeur de l'argent et d'un recentrage sur les valeurs sûres de l'art. L'incertitude économique et monétaire sur les mois à venir va encore accentuer ces effets pervers.
Frieze reste cependant un événement unique et conserve une identité à part, il y a bien sûr toujours autant d'événements autour de la foire, des talk shows, des visites assistées, des concerts, des constructions in situ, des installations à même de surprendre et d'éveiller la curiosité du public. Le Cartier Award, le parc de sculptures et tous les événements attachés à Frieze, pilote de petites foires "off".
La place londonienne reste tonique, désirée et un épicentre culturel indéniable.
Cette édition a permis d'accueillir plus de 1000 artistes, 151 galeries, 28 pays, 34 anglaises, autant d'américaines, 7 françaises. L'Allemagne, l'Italie, la Suisse et la Hollande sont les pays européens les plus représentés, timide présence chinoise, indienne, japonaise et coréenne. Nombre de leurs artistes sont déjà représentés par des galeries européennes.
Deux galeries marocaine et indienne ont été invitées à présenter leurs artistes émergents dans le cadre d'une opération gratuite.
Dès le premier jour, de gros achats ont été réalisés, dont les investissements majeurs de la Tate pour 150.000 £ et ceux du Frankfurter Museum für Moderne Kunst. Les grands collectionneurs internationaux sont toujours particulièrement choyés. Un événement unique au White Cube leur a été consacré, les frères Chapman ont "taggé" et signé pour les "super VIP" les billets de 20 £ et 50 £ que les collectionneurs leur confiaient. Nez en forme de pénis rose, yeux d'insectes, pattes d'araignées, Queen Elizabeth a été mise à rude épreuve. Comme pour Goya, Dinos et Jake Chapman se régalent et conservent leur irrévérence absolue. La queue durait jusqu'à trois heures et les billets se revendaient déjà cinq fois plus chers dans l'heure suivante…
Quelques œuvres en mémoire, le sulfureux mais fascinant crâne de diamants (diamond skull) de Damien Hirst dont la rumeur veut qu'il ait été acheté £50m par un consortium d'investisseurs, partiellement soutenu par l'artiste lui-même pour optimiser sa côte.
A la galerie Jablonka, les sculptures anamorphiques en acier miroir de Ron Arad, les fresques géantes de Fred Lachapelle, reconstitutions photographiques magistrales de la mythologie. Traitement totalement différent d'une approche chère à Bill Viola.
Chez Yvon Lambert, les trois femmes lumineuses de Jonathan Monk.
Quelques œuvres minimalistes dont les bois bruts de David Nash, la paroi creusée architecturée et spatiale d'Annely Juda, les miroirs d'angle de Buren et les structures de Donald Judd.
Les siamoises dérangeantes des Chapman, les puissants portraits de Yan Pei Ming chez Jansenn gallery.
Enfin, ne jamais quitter la foire sans une promenade dans le Parc de Sculptures, Kadder Attia, Dias and Riedweg, Jose Pedro Croft parmi les neuf propositions apportent de la force à ce parcours.
Frieze, à suivre…
Edith Herlemont-Lassiat
Londres, Octobre 2007
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